Sorti le 11 novembre dernier, Skyrim, le 5eme épisode de la série The Elder Scrolls de Bethesda, est un véritable phénomène. Dans la lignée de Morrowind et Oblivion, c’est un RPG de grande qualité qui a largement conquis le public. En effet, rien que sur la plateforme dématérialisée Steam, le jeu a vaporisé le record de joueurs simultanés avec près de 230 000 joueurs 24h après la sortie. Le précédent record était de « seulement » 80 000 joueurs, avec le lourdement médiatisé Modern Warfare 3.
La recette d’un succès
Ce qui a toujours fait la force de la série TES, c’est la profondeur de l’univers et sa relative cohérence par rapport à d’autres créations. Et Skyrim ne fait pas exception à cette règle.
L’histoire se déroule 200 ans environ après les évènements d’Oblivion, et l’Empire naguère si puissant va mal. La province de Skyrim est en pleine guerre civile, sans compter que de puissants envahisseurs continuent de conquérir Tamriel province par province. C’est dans ce contexte que vous débutez votre aventure, en tant que simple prisonnier en route vers une rencontre mortelle entre votre cou et une hache.
Durant la scène d’ouverture, vous discutez avec vos compagnons d’infortune, et apprenez rapidement que le chef de la rebellion est assis juste à côté de vous, et qu’il s’est fait attraper comme un débutant. En quelques minutes, tout en observant un paysage de montagne en plein blizzard, vous découvrez ainsi les grosses ficelles de la géopolitique locale, les personnes clés et les évènements importants qui ont amené la province de Skyrim au bord du gouffre.
Après la nécessaire phase de création de votre personnage, très complète comme toujours, vous êtes sauvé à une demi-seconde près de la mort par un dragon qui vient semer la désolation absolue dans le fort. Accompagné par un militaire, vous parvenez à sortir de cet enfer par les grottes, pour enfin arriver au village le plus proche. C’est à ce moment que vous devenez totalement libre de vos mouvements, et que l’aventure débute réellement.
La mise en scène est efficace, et en quelques dizaines de minutes vous avez pu avoir un avant-goût de tout ce que Skyrim avait à offrir.
Gameplay et petits oignons
Il est possible de choisir plusieurs façons de se battre, et il faut avouer que pour une fois, le choix est difficile. Aux poings, arme à une main ou deux, à l’arc ou encore avec la magie, vaincre vos ennemis n’as jamais été aussi intéressant dans un TES. En effet, il est possible de jouer un mage sans avoir besoin de spécialiser à fond pour tenter de devenir un pseudo-guerrier, ou encore de jouer un tireur d’élite avec votre arc sans devoir devenir un tank.
Mieux, on se surprend même à utiliser des stratégies différentes selon les besoins : de simple guerrier spécialisé dans l’épée à une main, j’utilise maintenant majoritairement l’arc, et la magie en complément de l’épée en intérieur. De plus, les cris, qui sont des pouvoirs de dragons, ajoutent encore un niveau de gestion et de possibilités. Enfin, les compétences sont très nombreuses, et les choix à faire vraiment nombreux pour tirer le maximum de votre spécialisation.
Les combats sont assez dynamiques, mais souvent confus une fois en corps-à-corps. Il faut aussi être attentif aux mouvements de l’ennemi, car nombreux sont ceux qui peuvent vous achever d’un seul coup. Les ennemis ne sont pas toujours adaptés à votre niveau, et vous devrez régulièrement vous faire discrets pour voyager correctement. Rendez visite à un géant, vous comprendrez très rapidement cette règle.
En parlant de voyages, si Oblivion était impossible à parcourir sans se prendre des ennemis sur la tête toutes les 30 secondes, Skyrim est bien plus intéressant. Les rencontre aléatoires existent toujours, mais sont nettement mieux intégrées et cohérentes. Ainsi, si l’on en venait rapidement à utiliser le fast-travel dans Oblivion, ici c’est avec plaisir que l’on prend son cheval pour aller à la prochaine ville. Les paysages sont beaux, et les détails sont partout.
Skyrim, un RPG d’exploration ?
Vous vous souvenez des donjons d’Oblivion ? Répétitifs, dupliqués tous les 50 mètres et parfaitement ennuyeux ? Et bien c’est terminé ! Ici, chaque donjon a été conçu par une équipe de designers. La moindre petite entrée que l’on aperçoit durant un voyage est une invitation à l’exploration et à la découverte. Mines hantées, cavernes géantes avec une petite forêt, anciennes ruines dwenners… En 40 heures de jeu, jamais un donjon n’a été semblable à un autre.
Cette exploration peut être provoquée par les innombrables quêtes secondaires qui peuvent se déclencher dans de nombreuses situations : le dialogue d’un passant, une discution entre habitants que vous entendez d’une oreille distraite, un livre que vous ouvrez ou même de simples objets trouvés. Le système est dynamique, ce qui fait qu’un donjon déjà réalisé ne sera pas réutilisé. Le dialogue vous mènera à un autre donjon, adapté à la volée pour que l’objectif corresponde. Ainsi, vos aventures sont uniques par rapport à d’autres joueurs. Mieux encore, un donjon nettoyé peut être réoccupé par des monstres ou des mercenaires, et ainsi être réutilisé, mais de façon cohérente dans les dialogues.
En fait, il est même possible de laisser tomber la quête principale et se lancer dans ce monde sauvage en guerrier solitaire. Les dialogues prévus et les options disponibles sont très nombreux. D’ailleurs, simplement s’asseoir en pleine ville pour observer la vie locale peut-être surprenant, quand un garde passe par là et vous lance un « Arrêtez de glandouiller !« . Vos actions, même indépendantes de tout scénario, seront parfois commentées par les passants ou les gardes.
De plus, le crafting est devenu vraiment intéressant. Il est possible d’enchanter des objets, de les construire, de les améliorer… On est heureux de tomber sur un filon de métal rare, afin de construire ses nouvelles bottes et d’améliorer son arme. C’est souvent une bonne motivation pour partir à la chasse dans les montagnes. On retrouve là l’un des intérêts principaux de Risen, en mieux.
Et les dragons dans tout ça ?
C’est là que ça devient intéressant. Les dragons sont de plusieurs types et forces, et peuvent être plusieurs. Ainsi, le premier dragon que vous combattrez vraiment va vous en faire baver, alors qu’un petit dragon rencontré aléatoirement durant un voyage pourra être défait relativement facilement. Mais voir un dragon attaquer et le combattre a quelque chose de grisant. De même, voyager tranquillement quand soudain vous voyez une grande ombre passer sur vous, suivit d’un cri à glacer le sang et de la musique des dragons, c’est une sensation vraiment à part. D’autant qu’il est capable de vous poursuivre très longtemps.
Vaincre un dragon vous permet deux choses : absorber son âme, qui servira à débloquer les cris (touche « R » dans le menu de magie, pour ceux qui cherchent encore), et récupérer des os et écailles, qui serviront, en plus de peser de tonnes, soit à vous enrichir, soit à fabriquer une armure lourde plus tard.
Enfin, il faut ajouter que les dragons ne vivent pas pour vous, et les NPC non plus. Il arrive de voir une scène au loin, d’un dragon attaquant un fort ou une ville, et les habitants se défendre farouchement. Encore une fois, voir un dragon souffler sur des murailles au loin est une image vraiment marquante.
En fait, le trailer live rend parfaitement bien le sentiment que l’on peut avoir dans ces situations :
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Le syndrome Bethesda
Cela dit, tout n’est pas parfait dans Skyrim. A commencer par le moteur du jeu qui est le même qu’Oblivion, qui lui même date de Morrowind. Bethesda a lourdement amélioré le moteur au fur et à mesure de ses jeux, entre autre sur Fallout New Vegas, mais il subsiste des travers toujours présents qui sont réellement énervants. Exemple qui parlera à tout le monde : la physique des objets qui fait que se déplacer dans une maison ressemble plus à un chamboule-tout hypersonique qu’à autre chose. De même, le feeling du personnage est toujours aussi mauvais dès qu’il s’agit de sauter ou de faire une action de précision, même si la vue à la première personne est enfin exploitable proprement.
Par ailleurs, les NPC persistent à être stupides dès que l’on sort de leur champ d’activité. Tuez un garde dans l’ombre, mais dans la zone d’un autre garde, et c’est la guerre. Tuez-le un pas plus loin, et tout ira bien.
L’autre point énervant, c’est le manque d’ambition dans l’écriture du scénario et de ses embranchements. Exemple, l’un des arcs scénaristiques secondaires va avoir des éléments qui devraient nécessairement influer sur le reste, de façon cohérente et même logique, mais au final le soufflé retombe et l’on n’entend plus parler des implications pourtant importantes de nos découvertes. De même, le scénario principal manque clairement d’intérêt par rapport au reste, et se termine en quelques heures à peine si l’on ne fait que ça.
Une communauté très active
Qui dit TES dit modding. Il faut savoir que depuis Morrowind, le logiciel de création du jeu est publié par Bethesda quelques temps après la sortie du jeu, pour le plus grand plaisir des joueurs qui peuvent ainsi modifier le jeu original. Textures, objets, décors, mais aussi de nouvelles régions entières, les limites sont très larges. Et les créateurs de mods s’en donnent ainsi à cœur-joie. Un Oblivion moddé n’a strictement plus rien à voir avec l’original. Certains diraient même qu’il devient enfin jouable.
Cette stratégie n’est pas innocente car c’est à la fois un excellent moyen de prolonger la durée d’exploitation des jeux, mais aussi de réduire drastiquement le travail de correction de bugs. En effet, il est même conseillé officiellement d’utiliser le fameux « Patch Non Officiel (PNO) » sur Oblivion, alors que la correction des bugs par Bethesda s’est limitée au strict nécessaire.
Ainsi, alors que l’outil pour Skyrim n’est toujours pas sorti, le site Skyrim Nexus contient déjà des milliers de mods, majoritairement des textures de remplacement. La liste est longue, et le nombre de moddeurs n’a jamais été aussi important, ce qui nous promet énormément de bonnes choses sous peu.
Autre signe qui ne trompe pas, de nombreux memes et détournements fleurissent un peu partout sur le net, reprenant avec humour des éléments du jeu et de son histoire. Certains artistes se sont même appliqués à réaliser des captures d’écran de toute beauté, comme DeadEndThrills.
Certains s’en souviennent peut-être, mais il y a un conflit entre Zenimax Studios (qui possède Bethesda) et Mojang, l’éditeur du célèbre Minecraft. Le problème se situant sur le nom du futur jeu de Mojang : Scroll. Ce dernier étant, selon Zenimax Studios, trop proche du nom de sa série The Elder Scrolls. Cette affaire est pratiquement résolue, mais a laissé quelques traces assez intéressantes. Ainsi, les développeurs, bien loin de ces questions de gros sous, ont caché dans un donjon un item unique, une pioche nommée « Notched Pickaxe« , en référence à Notch, le créateur de Minecraft.
Conclusion
Skyrim est un excellent jeu. Il n’y a aucun doute là dessus. Malgré ses faiblesses et ses bugs, on rentre rapidement dans cet univers si particulier, prêt à chasser le dragon et mettre à jour des complots, tout en allant trucider des squelettes. Ce jeu a été conçu intelligemment et avec passion par son équipe, et ça se voit.
Les possibilités d’améliorations dans un avenir proche sont nombreuses, et Bethesda a déjà annoncé qu’il y aurait des DLC sur le même modèle que New Vegas. C’est à dire cinq ou six DLC de 10 heures chacun environ. Il est d’ailleurs bien possible que l’un de ces DLC se déroule dans Morrowind, ainsi que dans certaines zones entourant Skyrim.
Malgré une année très chargée en jeux d’excellentes factures, Skyrim tire clairement son épingle du jeu et s’impose comme la nouvelle référence du genre sur PC, mais aussi sur console. A ce titre, préférez la version PC, afin de pouvoir profiter des milliers de mods qui existent déjà, et des graphismes largement supérieurs même avec une machine modeste.
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le patch officiel qui vient de sortir est buggé jusqu’à l’os…