Adeptes des théories du complot, réjouissez-vous, Room 237 sort dans les salles françaises ce mercredi. Le documentaire réalisé par Rodney Ascher donne la parole à des fans et experts de Shining persuadés d’avoir décrypté les messages secrets du film culte de Kubrick…
Véritable mine d’informations (et de questionnements !) pour les fans de Kubrick et de cinéma de manière générale, Room 237 part de l’idée que Shining n’est pas seulement l’adaptation du best-seller de Stephen King, mais avant tout un film aux multiples thématiques secrètes et aux différents niveaux de lectures. Le réalisateur Rodney Ascher nous transporte d’analyses en théories, explorant les couches et sous-couches du film avec cinq intervenants Geoffrey Cocks, Bill Blakemore, Jay Weidner, Juli Kearns et John Fell Ryan. Journalistes, professeurs ou musiciens mais avant tout fans obsessionnels de Shining, ces derniers exposent avec conviction leurs différentes théories sur le film culte de Kubrick.
Des théories plus ou moins crédibles
Pendant 1h40, Rodney Ascher nous balade de théories en théories, allant d’une allégorie de l’holocauste ou du génocide indien, en passant par le soi-disant faux alunissage d’Apollo 11 auquel aurait participé Kubrick… Certains intervenants s’amusent quant à eux à compter les allusions sexuelles (plus ou moins capillo-tractées) qui se glissent dans le film, reconstituent les plans de l’Overlook Hotel pour démontrer que des incohérences dans la balade à tricycle de Danny dans les couloirs de l’hôtel, ou voient dans les nuages d’un des plans d’ouvertures le visage de Kubrick…
Le tout est livré accompagné d’un montage personnel et décalé. A aucun moment Rodney Ascher ne nous montre le visage des personnes interviewées. Dans une volonté de mettre l’accent sur les théories et de ne pas laisser le titre ou le métier des intervenants prendre le dessus sur les idées et leur crédibilité, Ascher les place sur un pied d’égalité en ne nous offrant que leurs voix, posées sur des images de Shining et d’autres films de Kubrick (mais pas que) et sur un visionnage simultané du film à l’endroit et à l’envers, avec images superposées.
[quote_right]Rodney Ascher prend un malin plaisir à laisser le spectateur faire la part des choses et adhérer aux différentes théories, ou pas… [/quote_right]
Distance et second degré
Évidemment, n’attendez aucune réponse définitive. Avec Room 237, Rodney Ascher prend un malin plaisir à ne pas prendre parti et à ne pas mettre une théorie plus en avant que l’autre. Le réalisateur laisse donc le spectateur faire la part des choses et adhérer aux théories ou pas, avec une bonne dose de distance et de second degré si possible. On suit le film sans être totalement sûr que Rodney Ascher ne nous mène pas parfois en bateau. Croit-il lui-même aux théories exposées dans son film ? Il assure que oui en interview, mais lors du même entretien, il nous affirme également, à propos de Kubrick, que « les réalisateurs disent parfois des choses sur leurs films qui ne sont pas totalement vraies »…
Objet cinématographique incongru, situé quelque part entre le documentaire et le commentaire audio un peu barré, Room 237 est un film obsessionnel sur l’obsession, une déclaration d’amour légèrement psychopathe et cinglée à Shining et à Kubrick.
Tout aussi déroutant que stimulant, film-kamoulox pour certains, ou documentaire déjà culte pour d’autres, Room 237, s’il divise la critique, a au moins le mérite de plonger son public dans les tréfonds du chef-d’œuvre de Kubrick et donne furieusement envie de revoir le film, encore et encore…