L’histoire du tueur dérangé qui entend des voix n’est pas spécialement nouvelle. Mais quand sa mauvaise conscience prend la forme d’un chat à l’accent écossais, le tout enrobé d’une jolie couche d’humour noir, c’est un tout autre sujet ! Pour sa première incursion du côté du cinéma indépendant US, la franco-iranienne Marjane Satrapi fait très fort.
Jerry est un type mignon, sympa et volontaire, qui travaille dans une usine de baignoires à Milton, une petite ville paumée des Etats-Unis. Il aimerait bien séduire Fiona, l’Anglaise de la compta qui, elle, l’ignore complètement. Chaque soir en rentrant chez lui, Jerry raconte sa journée à son chien Bosco et son chat Monsieur Moustache. Ce qui est étonnant, c’est que ces derniers lui répondent… car Jerry est psychotique. Les petites voix dans sa tête vont avoir fort à faire quand le jeune homme va accidentellement tuer Fiona…
Avec The Voices, la réalisatrice Marjane Satrapi ajoute une nouvelle corde à son arc : celle de la comédie noire, américaine qui plus est. Si les héros serial killers sont plutôt à la mode ces derniers temps, notamment depuis l’avènement de Dexter, on est souvent face à des histoires très sombres. Si The Voices sait se montrer féroce, le traitement joue efficacement avec des scènes violentes, drôles et même franchement touchantes.
Norman Bates et son chat
La promotion du film met particulièrement en avant Jerry, incarné par un Ryan Reynolds au top, et M. Moustache, son chat roux à l’accent écossais. Le félin n’apparaît pourtant pas tant que ça à l’écran. Néanmoins, sa présence dans l’ombre de Jerry est symbolique, quasiment métaphorique : Monsieur Moustache incarne la part sombre de Jerry, qui projette ses idées noires à travers son animal. Bosco, le chien, joue plutôt le rôle de la bonne conscience, mais ce n’est pas vraiment ce qu’on a envie de voir.
Pourtant, Jerry est le véritable héros du film, malgré son authentique statut de psychopathe. L’interprétation de Reynolds est quasiment sans faille, il trouve ici l’un de ses meilleurs rôles, à n’en pas douter. Capable de jouer tantôt un Jerry candide, presque enfantin, tantôt un tueur au regard glacé, l’acteur fait prendre vie à un personnage dont la complexité s’appuie pourtant sur des clichés moult fois déjà vus. Mais appuyé par une mise en scène et un entourage canino-félin original et convaincant, la magie du cinéma bien fait opère, pour notre plus grand plaisir.
Le reste du casting n’est d’ailleurs pas en reste : Gemma Arterton fait ce qu’elle sait faire de mieux, à savoir la british un peu vamp sur les bords, dont on sait d’un seul coup d’oeil qu’elle va pousser Jerry à sa perte. Anna Kendrick incarne tout l’inverse, à savoir la girl next door qui donne l’espoir que tout pourrait s’arranger… ou pas. N’oublions pas que The Voices est une comédie noire qui s’assume totalement comme telle, malgré son univers teinté de couleurs vives qui rappellent les meilleures heures du cinéma burtonnien.
Ingéniosité et mélange des genres
Réalisé en à peine un mois avec un budget de seulement 11 millions de dollars, The Voices sait faire preuve d’ingéniosité dans sa mise en scène, et n’hésite jamais à mélanger les genres. Jamais cheap, jamais kitch, le film ose quelques rebondissements et invite même à réfléchir sur la perception de la réalité et le droit au bonheur. Au moment où on en vient à encourager le personnage principal de faire tout ce qu’il ne devrait pas, on se dit que la réalisatrice a vraiment réussi son coup.
Et tant pis si le final divisera probablement le public : The Voices est une réussite, un film original et décalé qui ose prendre des risques et provoquer avec un humour noir qu’on ne voit finalement pas très souvent dans ce genre de film, souvent trop sérieux pour être vraiment marquants. A ne rater sous aucun prétexte !
The Voices de Marjane Satrapi, avec Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick… sortie le 11 mars.
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