Il était une fois une série télé qui, lors de sa première saison, était mignonne, présentait des personnages attachants et une histoire sympathique, se basant sur les contes de fées en les épiçant juste ce qu’il faut pour que ça soit intéressant.
Et puis est arrivée la seconde moitié de la saison 2, puis la saison 3, et cette année, la saison 4 et… Mon dieu Once Upon A Time, que t’est-il arrivé ?
La seconde moitié de la saison 3 renouait (vaguement) avec ce qui avait fait le succès de la série à ses débuts, tous les espoirs étaient donc permis pour cette année, d’autant que Frozen et ses personnages pouvaient apporter une certaine fraîcheur à la série.
Mais comme souvent avec Once Upon A Time, ce qui était prometteur se révèle rapidement… Décevant.
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Bien décidée à avoir ENFIN sa fin heureuse, Regina (Lana Parrilla) décide de partir à la recherche de l’Auteur, celui qui a écrit le livre d’Henry, et qui aurait le pouvoir de l’aider. Mais ses plans sont interrompus par l’arrivée d’Elsa (Georgina Haig) qui cherche désespérément Anna (Elizabeth Lail), gelant tout sur son passage.
Cette recherche d’Anna ne va évidemment pas se dérouler comme prévue, entre flashbacks, révélations, pouvoirs incontrôlables et problèmes familiaux, et il faudra toute la sagacité (pfffrhahahaha) des habitants de Storybrooke pour ramener le calme sur leur ville.
Calme de courte durée, puisqu’une fois Anna et Elsa réunies, les Reines des Ténèbres feront leur apparition impromptue, elles aussi en quête de leur fin heureuse et de l’Auteur. Face à ses anciennes meilleures ennemies, qui mettront Emma (Jennifer Morrison) au cœur de la tourmente, Regina devra choisir son camp. *Dun dun DUUUUUUN.
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Comme vous l’aurez compris à la lecture du résumé, cette saison, comme la précédente, se divise en deux arcs distincts.
On ne va pas se mentir : la première partie, celle qui met en scène les personnages de Frozen, est au mieux ennuyeuse comme la pluie, au pire, nulle comme la mort.
On se retrouve en effet avec Elsa, Anna, et toute la clique des congères, mais… Ils arrivent de nulle part (enfin… Ils arrivent sans doute d’une volonté des producteurs de surfer sur le succès du film), leur histoire n’a RIEN A VOIR avec ce qui se passe dans Storybrooke, et Frozen étant récent, les scénaristes n’avaient sans doute aucune liberté quant à l’écriture des personnages.
Elsa passe donc son temps à courir partout, en criant : « Anna, Anna, où es-tu ? », et en congelant tout sur son passage, Anna passe son temps à courir partout en criant : « Elsa, Elsa, où es-tu ? », et en se fichant toute seule dans des imbroglios dangereux, et la méchante passe son temps à marcher pieds nus dans la neige, l’œil humide et éthéré.
C’est sympa sur un épisode, mais sur la moitié d’une saison, on est un peu courts.
De plus, Ingrid (Elizabeth Mitchell. Et ses seins) a des motivations qu’on a déjà vues à peu près trois milliards cinq-cents fois dans la série, ce qui ne joue pas trop en sa faveur, et les scénaristes réussissent le miracle d’écrire du rien pendant onze épisodes, sans parvenir à donner un semblant de profondeur au personnage. Du coup, ses actions sont celles d’une parfaite psychotique, et les moments qui devraient être chargés d’émotions sont juste chargés de « What the fuck ? ».
C’est vraiment dommage, d’autant que les actrices donnent tout ce qu’elles ont : Anna et Elsa sont mignonnes et elles y croient, mais quand ton personnage est écrit avec l’épaisseur d’une feuille de cigarette, il arrive un moment où tu ne peux rien faire de plus. Elizabeth Mitchell rencontre le même problème : elle y croit elle aussi, mais son talent seul ne peut faire exister le personnage, si les scénaristes et les dialogues ne suivent pas. Et en lieu et place d’une grande méchante tragique, on a… une folle inconstante en mode YOLO.
Cette première moitié de saison est donc assez ratée, il faut le dire. Et encore, on ne parlera même pas ici des personnages qui se croisent on ne sait pas pourquoi dans les flashbacks, de ceux qui, d’un coup d’un seul, se mettent à avoir peur de quelque chose qu’ils géraient parfaitement bien jusqu’alors, et autres rebondissements parachutés et inutiles.
L’arrivée des Reines des Ténèbres relève un peu le niveau, surtout parce qu’elles appartiennent à des films plus anciens, ce qui permet toutes les dérives et toutes les exagérations et tout le n’importe quoi dont Once Upon A Time est capable.
Les Reines, ce sont Maleficent (Kristin Bauer), Ursula (Merrin Dungey) et Cruella (Victoria Smurfit). Elles aussi sont à la recherche de leurs « happy endings », et chapeautées par Rumplestiltskin, vont entreprendre de trouver l’Auteur pour qu’il leur écrive cette fin heureuse tant désirée.
Soyons honnêtes : on est loin, bien loin de la qualité d’écriture de la première saison. Les motivations de Mal et d’Ursula ont été vues et revues (trois milliards cinq-cent une fois donc), et le traitement de l’intrigue part dans tous les sens, à grand renfort de dei ex machina, de personnages écrits en dépit du bon sens (les Charmings, particulièrement, font des choses parfaitement en contradiction avec leurs personnages, parce que… ben parce que le scénario l’exigeait et que c’était sans doute trop compliqué de tenter d’écrire ça correctement) et de rebondissements sortis d’un chapeau.
On a vaguement l’impression d’assister au trip sous LSD d’un fan de Disney.
Mais, contrairement à la première moitié de la saison, ici, ça fonctionne à peu près. A peu près hein…
Déjà, parce que si Ingrid est seule (et c’est d’ailleurs le grand drame de sa vie, que les scénaristes n’ont pas su nous montrer), les Reines travaillent ensemble, ce qui donne des scènes magiques de sarcasmes, de cynisme, de dialogues piquants. Maleficent et Regina qui se susurrent des horreurs, c’est un régal à regarder. Cruella et Ursula qui biatchent, Rumple qui trolle… Ça a autrement plus de gueule qu’Elsa et Anna qui se courent après.
Ensuite, si leurs histoires ne sont pas follement originales, Cruella tire son épingle du jeu lors de l’épisode qui lui est consacré, grâce à un retournement de situation bienvenu.
Et puis les actrices y vont à fond : elles embrassent totalement leurs personnages, et vont jusqu’au bout du bout. Mention spéciale à Cruella, dans l’exagération la plus complète, que ce soit dans son look ou dans son jeu. Ça ne plaira pas à tout le monde, c’est sûr, mais ce genre de personnage décomplexé et over the top, c’est toujours délicieux (et puis on est dans OUAT hein, la série où les gens sont verts, dorés à paillettes, avec des queues de poisson, et se jettent des nuages roses et des boules de feu à la face).
Mais là où la seconde partie est plus réussie que la première, c’est surtout qu’elle inclut les personnages « historiques » dans l’intrigue de façon à peu près logique. Emma et Regina ont des raisons de se montrer, d’interagir et de lutter. Même si en contrepartie, les Charmings et Belle tournent un peu en rond en faisant du rien. Bichettes.
Enfin, l’épisode final est plutôt sympa, et permet à certains acteurs de la série de montrer qu’ils sont toujours là et qu’ils savent toujours jouer. En plus d’offrir un cliffhanger de la morkitue.
Cependant, même si cette seconde moitié est plus réussie que la première, on ne peut nier que l’ensemble de la saison souffre de nombreux défauts.
Déjà, rassurez-vous : non, les effets spéciaux n’ont pas été améliorés… Ce qui donne, comme d’habitude, des scènes vaguement ridicules où le fond vert se sent comme le nez de Pinocchio au milieu de sa figure. Et la pauvre Ursula, avec ses tentacules, même si l’actrice y croit bravement, c’est pas très très réussi.
Ensuite, le scénario est complètement en roue libre. On a l’impression que le mot d’ordre en salle d’écriture, c’était « YOLO » :
– On a besoin que ce personnage fasse ça, mais ça va être compliqué à justifier… A moins qu’on pose ça là, l’air de rien ?
– Ecoute, YOLO.
– On a des trous dans le scénario de la taille de la galaxie d’Andromède… On essaie d’arranger ou… ?
– Nin… YOLOOOOOO o/
On a d’ailleurs le sentiment que la série embrasse pleinement ce n’importe quoi sans même plus tenter de le justifier, pour devenir une sorte de parodie d’elle-même dans laquelle plus c’est gros, moins c’est bien amené, et mieux c’est. Le personnage de l’Auteur apporte de plus un côté métatextuel à l’ensemble, ce qui le rend encore plus délirant.
Ça peut avoir son charme, mais il est clair qu’une partie du public risque de se perdre en route.
Là où la série pêche vraiment, en revanche, c’est sur ses personnages. Et leurs relations.
Les Charmings ne sont que l’ombre d’eux-mêmes. On est bien d’accord que Prince C n’a jamais été le plus intelligent ni le plus utile des hommes, mais Blanche-Neige, quand même, elle est était plutôt cool au début : elle bottait des culs, elle tirait les ogres à l’arc, elle tenait tête à Regina…
Là, le couple en est réduit à faire des trucs qui trahissent complètement leurs personnages, ou alors du rien. Supaire.
Belle et Rumple, c’est la même chanson. Rumple abuse de Belle, en la manipulant, en lui mentant, encore et encore, et Belle répond : « d’accord d’accord »… Elle tente bien de se rebeller, mais ça ne dure pas bien longtemps. Alors oui, oui, La Belle et La Bête au départ, on sait bien que c’est un syndrome de Stockholm qui finit en mariage. Mais là depuis quatre saisons maintenant, il serait bien qu’on passe à autre chose, parce que ce « je t’aime, moi non plus » n’a que trop duré.
Et puis il y un point sur lequel les scénaristes devraient se sortir les doigts (de l’orifice de leur choix) : les relations amoureuses de Regina et Emma. Parce que cette saison bat tous les records de subtext entre les deux héroïnes, alors même qu’elles sont censées avoir trouvé leurs âmes sœurs respectives.
Concernant Hook et Emma, leur histoire a une certaine substance : ils ont traversé pas mal d’épreuves ensemble, et ils partagent quelques scènes assez mignonnes et intimes.
Le problème de ces scènes mignonnettes, c’est qu’elles sont généralement suivies d’une autre scène tout aussi mignonnette avec Regina, mais on peut tout de même saluer l’effort des scénaristes.
En revanche, Regina et Robin des Bois… Ils se sont retrouvés ensemble parce que BIM « destinééée », et BOUM « trou luv », mais ce n’est pas parce qu’on nous DIT que des gens s’aiment qu’on y CROIT forcément.
C’est un peu comme Belle : on nous a dit plusieurs fois que c’était une intellectuelle (elle lit des livres et tout, et c’est grâce à son cerveau qu’elle a sauvé le Prince Phillip la première fois qu’elle a rencontré Mulan), mais globalement, on nous la montre comme une gourdasse au QI d’huître morte.
C’est pareil pour nos tourtereaux : on nous dit qu’ils s’aiment donc, mais on nous montre des personnages qui ont peu de scènes en commun, dont les acteurs ont peu d’alchimie à l’écran. Robin des Bois est un gland faussement tiraillé entre ses sentiments et son honneur, sur qui Regina ne peut pas vraiment compter. Quant à cette dernière, elle fait comprendre à plusieurs reprises que Robin est peut-être son âme sœur, mais pas la chose la plus importante de sa vie.
On a donc des relations un peu vides et moyennement crédibles, surtout quand Lana Parrilla lance des regards de braise à Jennifer Morrison.
Parce que le second problème de ces relations, ce sont les torrents de subtext dans lesquels se noie la série. Même Elsa brandit (métaphoriquement) sa bannière « I Ship SWANQUEEN » dans un des épisodes. Et ne parlons même pas des Reines de la Nuit, qui doivent faire des ravages en discothèques gay.
De deux choses l’une :
– soit personne, ni les scénaristes, ni les réalisateurs des épisodes, ni les actrices, ni les producteurs ne savent mettre en scène une amitié.
– soit c’est tout à fait volontaire.
Vu le nombre de regards, de situations, de dialogues ambigus, l’accident paraît peu probable. Et on se retrouve donc avec une série qui nous dit « Hook/Emma, Regina/Robin, c’est trop le grand amour » mais qui nous montre deux héroïnes qui se soucient plus l’une de l’autre que de leurs moitiés en de très nombreuses occasions, et qui ont une complicité et une alchimie à l’écran quasiment inégalées dans le reste de la série.
Du coup, s’il est tout à fait sain d’avoir des ami(e)s qui comptent autant que son âme sœur, le décalage est ici tellement important qu’il sape la crédibilité des couples établis, particulièrement celui que Regina forme avec Robin.
On se retrouve avec des relations bancales, qui sont loin de faire honneur aux personnages. Et avec un subtext purement gratuit.
Au final, dans cette quatrième saison de Once Upon A Time, il y a à boire et à manger.
Les scénaristes ont l’air d’avoir complètement abandonné l’idée d’écrire une histoire sans trous et des personnages cohérents avec eux-mêmes ; certaines situations se résolvent extrêmement rapidement, d’autres traînent en longueur inutilement, et les dei ex machina pleuvent, accompagnés de leurs potes les rebondissements WTF.
Cependant, si la saison est loin d’être parfaite, force est de constater que quand la série embrasse son côté « trip sous acides », avec ses personnages hauts en couleurs, ses situations rocambolesques, quand elle se laisse aller à flirter avec l’auto-parodie, elle peut être encore très divertissante, voire même surprenante, dans le bon sens du terme.
Le final plante un décor prometteur pour la cinquième saison, en bouleversant l’équilibre établi jusque là. Si en étant libérée des contraintes que présente un scénario cohérent, l’équipe créative voulait bien se concentrer un peu sur les personnages, on pourrait retrouver la OUAT des grands jours à l’automne prochain.