En ce mois de juin fort prolifique en sorties, les fans d’heroïc-fantasy ont de nombreux univers à parcourir. Après le très estimé Witcher II, Hunted : The Demon’s Forge débarque. Bien qu’étant une nouvelle licence, Hunted était attendu au tournant. En effet, c’est l’oeuvre d’inXile, studio de Brian Fargo, fondateur d’Interplay, à qui l’on doit notamment Fallout et Baldur’s Gate. Rien que ça. Pourtant, n’allez pas croire que Hunted est un RPG foisonnant. Il s’agit plutôt d’un jeu d’action piochant les bonnes recettes à droite à gauche tout en proposant des doses homéopathiques de jeu de rôle. De quoi regretter les illustres références ?
Les bons petits clichés qui vont bien…
Hunted : The Demon’s Forge nous permet de voyager à Kala Moor, un monde moyenâgeux sombre et semé de créatures monstrueuses. Nous suivons les aventures de deux héros avides d’argent et de gloire : Caddoc, un gros bill chauve et tatoué avec un faux air de Vin Diesel, spécialisé dans le CAC et les armes de kéké , et E’lara, une elfette aux seins triangulaires, professionnelle du tir à l’arc, comme toutes les elfes dignes de ce nom. Le scénario du jeu s’avère on ne peut plus classique, voir même anecdotique. Caddoc fait de vilains cauchemars dans lesquels Séraphine, délicieuse créature à mi-chemin entre une Xena la guerrière albinos et Hannah Minx, lui promet moultes richesses tout en le menant bien entendu à sa perte, incarnée dans une créature bien moins charmante et plutôt mortelle. En se réveillant, Caddoc se retrouve avec sa sympathique coéquipière de galère et il ne faut pas attendre 5 minutes avant que les héros tombent devant la fameuse Séraphine. Bien évidemment, cette base scénaristique sert de prétexte à de grandes ballades dans des dongeons plus ou moins infâmes, habités par les habituelles bestioles que l’on retrouve dans ce type d’univers : squelettes, orcs, dragons, araignés géantes, minotaures…
Resident Evil 5 + God of War + Dragon Age = ?
Vous l’aurez compris, la castagne est au rendez-vous. Le jeu propose un gameplay qui reprend les bons principes des derniers jeux d’action à succès. Les deux personnages ont la possibilité de combattre à distance, avec une arbalète pour Caddoc et un arc pour E’lara, mais aussi au corps à corps. Evidemment, la petite elfette toute menue est plus habile de loin alors que Caddoc excelle dans le jeu physique. Il existe alors deux stratégies à utiliser : quand on opte pour le combat à distance, on retrouve les codes des jeux d’action comme Gears of War : on peut se cacher derrière les décors, sortir pour tirer au moment opportun, sauter d’une planque à une autre…. Mais quand les ennemis s’approchent, il suffit d’appuyer sur une touche pour passer rapidement en mode corps à corps. La jouabilité s’apparente alors davantage aux beat’em all comme Castlevania ou God of War, le dynamisme en moins. Les combats reposent sur deux touches d’attaque (coups rapides et coups violents) et une touche pour se protéger. L’ensemble est correct mais à trop vouloir en faire, inXile oublie d’apporter les petits plus qui rendent les combats intéressants : à distance, le nombre d’action possible est très limité, alors qu’au corps à corps, il n’existe pas de véritables combos ou d’enchainements à réaliser. Au final, c’est un peu léger voir carrément mou. C’est d’autant plus dommageable qu’il n’existe pas d’inventaire et qu’on doit jeter les armes que l’on a pour ramasser celles que l’on trouve. Ainsi, quand on a enfin dégoté son arme de prédilection, on n’a pas forcément envie de s’en séparer. Mais, on y est souvent contraint : les zones sombres obligent le joueur à troquer sa hache enchantée contre une pauvre torche faiblarde, et le bouclier s’use plus vite qu’un bloc optique Playstation. De même, les objets magiques perdent leurs pouvoirs très rapidement, ce qui peut être vraiment frustrant. Le choix de ne pas proposer d’inventaire est donc contestable et risque de déplaire aux amateurs de jeux de rôle.
Heureusement, comme dans tout bon jeu d’heroïc-fantasy, la magie est présente. Les sorts disponibles apportent une véritable dimension stratégique aux batailles et viennent combler les lacunes du système. Ainsi, le sort d’un des personnages peut permettre à l’autre de faire des ravages chez les adversaires. Exemple tout simple : E’lara peut tirer des flêches glaçantes qui gèlent instantanément les adversaires. Caddoc n’a plus qu’à vite démolir les glaçons à grand coup d’épée. L’importance de la collaboration entre les deux personnages devient alors flagrante, pour notre plus grand plaisir.
Gare aux noobs en coop !
Ainsi, il ne faut pas oublier de penser avec les deux personnages. Les nombreuses situations nous obligent souvent à la jouer fine pour passer sans encombre. La difficulté n’est pas excessive, la version facile est d’ailleurs sans intérêt. En difficile, foncer dans le tas se finit très souvent par un game over. En effet, on se retrouve très rapidement coincé au milieu de nombreux ennemis, tout en étant la cible d’archers assez précis. Il faut donc analyser chaque situation, repérer tous les ennemis, et agir en conséquence par équipe. C’est déjà plus intéressant. Heureusement, l’IA du partenaire n’est pas trop mauvaise. Le coéquipier utilise ses sorts, n’hésite pas à soigner et s’adapte à chaque situation. On ne se retrouve donc jamais dans la situation improbable où E’lara continue de tirer à l’arc sur des ennemis au corps à corps. De même, Caddoc ne fonce -généralement- pas bêtement sur les ennemis. Néanmoins, il arrive que cette IA n’utilise pas le sort le plus adapté. C’est mieux que rien, mais on aimerait pouvoir switcher à volonté entre les deux personnages. Malheureusement, il faut rejoindre un espèce de point de sauvegarde pour changer de bonhomme. Frustrant. Pour finir sur l’IA, il faut signaler que les ennemis sont plutôt stupides et chargent les héros sans essayer de contourner l’adversaire ou de le piéger. Néanmoins, leur position sur les différents niveaux fait qu’ils sont déjà suffisamment chiants à dénicher. Les situations restent tout de même assez répétitives et pas vraiment innovantes.
Le jeu a plus d’intérêt en multijoueur coopératif, pour peu que l’on tombe sur un joueur pas trop mauvais. En effet, Hunted demandant un certain calme, on peut être amené à recommencer 10 fois le même passage pour réussir. C’est d’autant plus compliqué qu’on n’a aucun moyen de communiquer avec son partenaire. Ceux qui ont gouté à Portal 2 en multijoueur seront rapidement lassés, les autres trouveront peut-être le courage d’aller au bout de l’aventure.
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Une réalisation inégale
D’un point de vue visuel, on ne peut pas dire que Hunted : The Demon’s Forge soit une grande réussite. Le jeu a été conçu sous un Unreal Engine qui commence à tirer la langue. Les textures sont médiocres et les graphismes sont inégaux. Certains environnements extérieurs sont plaisants à traverser alors que d’autres sont incroyablement vides. Alors oui, dans la bonne Dark Fantasy, les dongeons sont censés être sinistres, mais mettre juste des pierres et de la mousse, c’est un petit peu léger. Le level-design est également moyen. Certains passages sont intéressants mais nous ne retrouvons pas l’ingéniosité des niveaux de Demon’s Souls. De plus, le jeu est extrêmement linéaire, ce qui fait un peu tâche quand on porte l’étiquette « jeu d’aventure ». Malheureusement, les animations ne font rien pour arranger l’ensemble. Les personnages sont assez rigides et l’animation des visages est vraiment moyenne, surtout après avoir vu les prouesses de LA Noire. Au niveau de l’ambiance, il faut souligner l’effort qui a été fait pour donner une atmosphère crédible au jeu. Le character design est plutôt bon même s’il n’est pas particulièrement original. Les boss sont bien réalisés, ce qui donne quelques scènes plutôt spectaculaires. Les dialogues sont emprunts d’une touche d’humour qui fait parfois mouche. Malheureusement, les doublages français sont complètement ratés. La voix de Caddoc est surjouée alors qu’E’lara est simplement insupportable. La réalisation d’ensemble est donc plutôt mitigée…
Conclusion
Hunted : The Demon’s Forge est un jeu sympathique, mais loin d’être révolutionnaire. Le gameplay est ambitieux mais pas vraiment abouti malgré un potentiel certain. Le point fort reste le mode multijoueur qui oblige une collaboration de tous les instants, pour peu que les joueurs choisissent un niveau de difficulté qui pousse au challenge. Malgré une IA assez dynamique, le mode solo est un peu ennuyeux. Malheureusement, l’aventure est un peu linéaire et tournée vers une action plutôt répétitive. C’est d’autant plus gênant que la réalisation ne donne pas vraiment envie de fouiller les niveaux et de résoudre les énigmes annexes. On est quand même loin d’un Demon’s Souls qui compensait largement ses grosses lacunes techniques par un système de jeu irréprochable et un plaisir (malsain) présent d’un bout à l’autre du titre. Hunted s’adresse donc à un public moins hardcore, féru d’action et de fantasy et surtout aux accrocs du multijoueur. Les rôlistes passeront leur chemin…
Disponible sur PS3, X-Box 360 et PC depuis le 3 juin.