Oui, oui, encore un ! Encore un jeu qui nous propulse aux commandes d’avions de chasse de la Seconde Guerre Mondiale, cette fois dans le Pacifique. A l’heure où des Ace Combat et autres H.A.W.X. proposent au joueur des combats aériens dans un futur proche, il est assez intéressant de noter que cette sombre période de notre histoire puisse encore générer de nouveaux jeux, films, bandes-dessinées, et j’en passe, même si ces produits le sont de moins en moins (intéressants, suivez, non de non !)
Développé par Trickstar Games et édité par Mad Catz (oui, le créateur de périphériques de jeux, mais nous y reviendrons), Damage Inc. Pacific Squadron nous propose de revivre les batailles du Pacifique, de l’assaut sur Pearl Harbor à la prise d’Iwo-Jima.
Afin de mettre en avant le réalisme historique qu’il revendique, le jeu met à notre disposition plus d’une trentaine d’avions, la plupart pouvant être améliorés au moyen de points gagnés au cours des missions. Ces améliorations ne sortent pas de nulle part, puisqu’elles prennent la forme du vrai successeur de chaque coucou. Bon, après, il est certain que mener une bataille de 1942 avec un modèle amélioré qui ne fut créé que deux ans plus tard, niveau réalisme… Mais je fais ma mauvaise langue. Des défauts, des vrais, nous en verrons bientôt.
Toujours à la page du réalisme historique, nous avons même le droit à la haine anti-jap. C’est un petit détail, qui surprend au début, mais niveau immersion, on se prendrait presque pour un vrai ricain du fin fond du Wyoming parti défendre la liberté aux quatre coins du globe (et trouer du vilain jap, bien entendu).
La plupart des batailles, à l’image de celles de l’Île de Wake ou de Midway, sont divisées en plusieurs missions. Ce qui pourrait être un plus pour la durée de vie s’avère être au final plutôt barbant. En effet, lorsque l’on achète un jeu d’avions de chasse, c’est pour démonter du pilote, flinguer de la carlingue, poutrer de l’escadrille ! Pas pour passer vingt minutes à survoler des îles afin de les prendre en photo pour l’état-major. Cela part certainement d’un bon sentiment, les développeurs souhaitant faire vivre l’intégralité de l’opération au joueur. C’est au final plutôt malhabile. Pour preuve, là où l’on a du mal à décrocher d’un H.A.W.X., on peut éprouver une certaine réticence à lancer une nouvelle bataille à la seule pensée de la mission de reconnaissance qui va peut-être précéder la boucherie. Il faut cependant reconnaître que certaines de ces missions sont plus animées que d’autres, avec parfois quelques combats au programme.
Les combats, parlons-en. Très mous sur les premières missions, ils s’améliorent à mesure que les batailles avancent et gagnent beaucoup en animation, les avions et les navires étant parfois légions sur certaines maps. Mais la difficulté n’est vraiment pas au rendez-vous, la faute à une IA complètement à la ramasse. Prenez Ace Combat X, sorti sur PSP en 2006. J’ai souvenance de grandes batailles, où décrocher une bonne fenêtre de tir pouvait parfois prendre un temps fou, et où les ennemis ne nous pardonnaient aucune erreur. Si Damage Inc. fait voeu de réalisme, j’ose espérer qu’il n’en est rien du point de vue du gameplay, car sinon, cela voudrait dire non seulement que les Japonais étaient de vraies brelles sorties tout droit des petits avions de supermarché, mais qu’en plus les Américains étaient de sacrés branleurs. A partir du moment où vous accrochez un chasseur, c’est fini pour lui. Aucune acrobatie pour vous larguer, aucune volonté de survivre, le pilote pourrait se retourner pour inviter à tirer que vous n’en seriez pas étonné. Niveau agressivité, zéro ! Vous vous placez derrière un bombardier possédant un mitrailleur de queue, il tirera quelques cartouches ne vous faisant perdre qu’un ou deux millimètres de vie, et plus rien. La technique Ben Kenobi. Les canons DCA vous chatouilleront sous les ailes, si tant est qu’ils vous touchent. Cela fait rire, au début. Seulement au début. On se lasse assez vite de réussir aussi facilement chaque nouvelle mission. Le tir à la carabine de la foire locale coûte 2€, pas 50, et vous donnera peut-être plus de fil à retordre.
Au niveau de la jouabilité, en revanche, très peu de choses à redire. Chaque modèle a son comportement bien à lui, on ressent vite les différences d’un avion à un autre. Et on le paye, parfois, lorsque l’on veut tenter une super acrobatie avec un gros bombardier que même le Baron Rouge il aurait peur tellement qu’elle est belle tellement qu’elle est risquée tellement qu’elle est classe, ayant oublié qu’il n’a ni l’agilité ni la réactivité d’un petit chasseur.
Lors des combats, un petit point rouge se place devant les ennemis afin de nous indiquer ou tirer pour toucher notre cible. Si ce genre de système n’existait certainement pas à l’époque, difficile de critiquer ce choix de gameplay. Même avec l’indicateur de distance de cible, toucher les bogeys relèverait de l’exploit.
Deux styles de pilotage sont disponibles : arcade et simulation. Le premier porte bien son nom, et est uniquement destiné au débutants. Tout joueur un peu plus chevronné partira intuitivement sur le mode simulation, qui est très fidèle à ce qui se fait habituellement dans le milieu. En arcade, ne sera disponible que la vue extérieure (je ne pense honnêtement pas qu’elle serait jouable en vue cockpit), tandis que le mode simulation autorise vue cockpit, vue à la première personne sans cockpit, et vue extérieure. Dommage qu’il faille partir dans le menu des options pour changer la vue lorsqu’on le souhaite…
Quant au mode multijoueur, il est à l’heure actuelle impossible d’en dire quoi que ce soit. Et il y a fort à parier que trouver du monde en ligne relève de l’exploit à la sortie du soft.
Pour ce qui est des graphismes, c’est la déception qui règne. A l’image des autres aspects du soft, on sent un réel effort de la part des développeurs, dont les limites furent leurs moyens. Les cockpits sont globalement bien modélisés, même si leurs textures sont parfois un peu pauvres. Le gros bémol est l’absence des jambes du pilote, ainsi que de toute animation. L’altimètre ne bouge pas, l’indicateur de balance non plus. Et c’est vraiment dommage. Comme partout, c’est un sentiment de manque de finition qui nous frappe. Prenez les décors : pauvres au possible, aux textures aussi grossières que Jean-Marie Bigard, les paysages terriens sont affreux, et manquent parfois de logique : ils sont allés jusqu’à mettre des sapins sur Pearl Harbor ! A cent mètres de la plage ! DES SAPINS ?! Remarque, pratique, pour les cercueils.
Les plus beaux décors sont les archipels, et pour cause : trois îles, et de l’eau de mer (pas trop moche). Mais ce, seulement lorsque la mission a lieu en pleine journée par temps ensoleillé. Les gars de chez Trickstar ont tenté de créer de superbes ciels de crépuscules. Mais entre nuages aliasés et troubles au possible, et des couleurs aux teintes dégueulis de gamin de maternelle après s’être enfilé ses tubes de gouache, on repassera (ou pas, d’ailleurs).
Mais l’un des plus gros problèmes du soft réside dans les bugs, trop nombreux. On explose parfois en plein vol parce qu’un allié nous a foncé dessus (enfin, si on voit l’explosion, car on disparait parfois simplement, comme dans la Quatrième Dimension), et si l’on explose pas, on est propulsé en tournoyant. Logique. Les pilotes japonais peuvent parfois se crasher tous seuls, en fonçant droit vers le sol. Il m’est arrivé que les objectifs de mission n’arrivent jamais, m’obligeant ainsi à relancer la mission. L’un des bugs les plus rageant concerne les unités d’infanterie au sol. Plusieurs fois dans le jeu, on vous demandera de couvrir vos troupes en mitraillant l’infanterie japonaise. Par deux fois, j’ai littéralement dispersé et ventilé les unités d’infanterie, pour en voire une seulement représentée par son indicateur avancer vers son objectif. Intouchable, donc, elle se rendait à la caserne, ou à l’aéroport que je devais défendre, et faisait échouer la mission sous les yeux de votre serviteur, impuissant face à tant de haine bugs.
Si l’on devait exprimer notre sentiment face à Damage Inc. Pacific Squadron, ce serait de la peine. On sent les efforts et les aspirations de Trickstar à chaque minute de jeu, mais la technique et les moyens ne suivent pas toujours. Des graphismes souvent pauvres au bugs intolérables en passant par l’IA qui ne procure aucun défi, il ne nous reste que peu de choses pour apprécier nos missions. Pourtant, on peut se surprendre à s’amuser et à se prendre au jeu. Certaines missions finies, le compteur de temps nous étonne en nous annonçant que nous venons de passer une demi-heure à casser de l’envahisseur nippon.
Pourquoi si peu de finition ? Nous disions en début de test que le jeu était édité par Mad Catz, le célèbre concepteur de périphériques de jeu. Et il se trouve que, comme de par hasard, MC profite de la sortie de D.I.P.S. pour sortir un nouveau joystick, vendu en bundle avec lui… Alors, jeu-prétexte ? C’est bien possible. Et c’est regrettable, car nul doute qu’avec plus de moyens, ce Damage Inc. qui fait cheap jusque sur sa jaquette aurait vraiment pu sortir du lot.