Après un Battlefield 3 qui a su marquer les esprits par de bonnes idées et un niveau graphique faisant honneur à la série (tout en remplissant de joie les PCistes bien équipés), DICE et EA Games remettent le couvert cette année avec un 4ème opus. Sorti en 2011, le précédent volet présentait des changements suffisamment notables pour qu’on lui pardonne quelques maladresses : en moins de 2 ans, on peut donc légitimement se demander si la sortie d’un nouvel épisode n’est pas un peu précipité…
Un aspect technique en demi-teinte
Si vous êtes bien équipés côté config’ PC, le jeu fera des merveilles pour vous éblouir les yeux, parfois même au sens strict du terme. Sur des configurations un peu plus modeste, il faudra faire l’impasse sur certains effets pour garder un framerate correct. Pour pousser le niveau graphique en ultra, il vous faudra minimum une GTX 7xx du côté de Nvidia ou une Radeon HD 79xx pour garder un jeu jouable et relativement fluide. Pour les gammes en dessous, on pourra aisément rester en qualité haute/moyenne tout en ayant un jeu qui reste agréable à regarder. Prévoyez également 8 Go de RAM car à 4 Go, le jeu peinera sans doute un peu à se montrer performant. Il est d’ailleurs un peu gourmand en CPU, mais si vous disposez d’une bonne carte graphique, même un Intel i3-2100 sans bidouillage et autre overclocking peut amplement suffire en optimisant bien son équipement (on recommandera quand même d’opter pour un i5 dans l’absolu).
Et si les experts auront peut-être un avis encore différent, c’est bien par là que commence les soucis avec le FPS d’EA Games : on n’a pas vraiment l’impression que le jeu sur PC s’adresse à un public de néophytes. Et ça commence dès l’installation du jeu : Origin est toujours obligatoire pour activer sa copie et il faudra donc l’installer dans un premier temps tout en apprenant à comprendre son fonctionnement.
Après avoir complété l’installation, il faudra lancer le jeu à partir de l’interface battlelog qui est toujours de la partie et qui se lance dans votre navigateur par défaut : si vous n’étiez pas trop habitués avec Batllefield 3, ça ne changera pas avec le 4. L’interface est un peu plus clair mais toujours loin d’être « friendly use » et il est toujours autant nécessaire de rajouter un plugin made in EA qui ne se met pas à jour automatiquement (et qu’il faudra réinstaller à chaque fois qu’une mise à jour du client est disponible).
Sous Windows 8, vous aurez sans doute besoin ou de réinstaller depuis le répertoire Directx ou de forcer la compatibilité en mode Windows 7 si jamais le jeu plante dès le lancement. Pour un titre AAA, cela fait quand même un peu tâche de devoir ruser et bidouiller dans les fichiers pour faire fonctionner le jeu, d’autant plus que les réponses ne se trouvent pas forcément d’un claquement de doigt, même avec Google. A se demander si les bêta-tests ont vraiment permis de déceler des problèmes pour les corriger ou s’il s’agit simplement d’une vague stratégie marketing pour faire parler du jeu en attirant un maximum de joueurs.
Au delà de ça, le jeu demeure très beau, mais si vous avez déjà joué à Battlefield 3, l’effet sera peut-être moins bluffant.
Une référence pour les FPS multijoueur… quand ça marche !
la principale différence par rapport à son prédécesseur vient de l’influence plus importante de l’environnement pouvant vraiment changer la physionomie d’une partie. En solo, on aura beaucoup de mal à constater le changement mais en multi, le système Levolution permet, en principe, de donner des avantages non négligeable à son équipe : couper le courant pour réduire la visibilité de l’ennemi, faire s’effondrer des bâtiments entiers, détruire une barrage pour inonder une map, etc… Jusque là, et concrètement, il arrivera rarement que ces effets perturbent d’une façon significative une partie et on a quand même l’impression que c’est plus souvent juste histoire d’apporter un peu plus d’interactivité avec la map, mais sans plus. Sur des parties plus organisées, l’impact de Levolution est peut-être plus perceptible, mais pas si on joue avec la plèbe, on reste dans le domaine du bonus cosmétique.
[quote_left]la force de Battlefield […] : le travail d’équipe[/quote_left] La formule qui fait la force de Battlefield reste la même : le travail d’équipe qui est toujours plus gratifiant et permet bien souvent de prendre l’ascendant sur des joueurs coriaces. Le système de squads est également resté quasi-intact et permet aux batailles à 64 joueurs de garder une certaine clarté.
Ce sera notamment nécessaire dans le mode Conquête qui peut proposer des maps de taille plus importante que sur consoles : donc comme sur Battlefield 3, on pourra opter pour le mode « Conquête large » dans ce cas là. On rappellera que les version Playstation 3 et Xbox 360 ne peuvent accueillir que 24 joueurs maximum dans une partie pour des raisons techniques. L’objectif est toujours de capturer des drapeaux, tout en éliminant ses adversaires et de perdre le moins de « tickets » possible, la première équipe perdant tout ses tickets perd aussi le match.
Le mode Domination est proche du mode conquête, à la différence près que les maps sont plus petites et que l’action y est beaucoup plus intense puisque les objectifs sont plus proches et dans un espace forcément plus réduit. Battlefield 3 proposait déjà ce mode mais sous forme de DLC (Close Quarter).
Le mode Ruée (Rush) est aussi de retour et le but est toujours d’exploser 2 objectifs successifs pour faire apparaître les 2 suivants : une équipe doit donc attaquer ces points tandis que l’autre doit les défendre.
Les 2 seules modes un peu nouveau sont Anéantissement (Obliteration) et Désamorçage (Defuse). En revanche, soyons honnête, les développeurs ne sont pas allés cherché bien loin : dans le premier cas, il faut trouver une bombe puis tout faire exploser et pour le second, il s’agit tout simplement de désamorcer une bombe ou buter la totalité de l’équipe d’en face en la jouant team deathmatch. On se dit quand même que ça aurait pu faire l’objet d’un DLC pour Battlefield 3, voir d’une mise à jour gratuite car finalement, on n’est pas loin du procédé du mode multijoueurs de Mass Effect 3 qui consiste à simplement greffer des objectifs supplémentaires au mode de jeu de base sur l’ensemble des maps disponibles.
[quote_right]On n’est pas loin du procédé du mode multijoueurs de Mass Effect 3 qui consiste à simplement greffer des objectifs supplémentaires au mode de jeu de base[/quote_right]On a donc quand même de quoi faire si on aime le multi et la compétitivité, il y a tout un tas de véhicules à piloter (un mode d’entraînement permet même de se faire la main dessus pour ajuster ses contrôles si besoin) et les parties sont organisées sur des serveurs dédiés : il faudra prendre soin de ne pas se retrouver en Australie pour avoir un ping correct. Les différents filtres du battlelog permettent, à ce titre, de facilement trier les serveurs pour trouver un serveur un minimum peuplé assez rapidement. Et ça s’arrête là pour le Noob Friendly : si vous n’avez jamais touché un Battlefield de votre vie, il faudra beaucoup de patience et de la persévérance avant de vous amuser vraiment. Le jeu est intransigeant et beaucoup plus tactique qu’il n’y parait : c’est ce qui fait sa force mais le rend un peu hermétique par la même occasion. Il faudra débloquer pas mal d’équipements au fil des parties pour les 4 classes disponibles afin d’être efficace et trouver son build favori, d’où la nécessité d’être particulièrement motivé si on décide de se lancer dans le jeu.
La version PC souffre malheureusement depuis son lancement de nombreux problèmes techniques qui touchent une partie des joueurs : freeze, crash du jeu, redémarrage total de l’ordinateur, fuites de mémoire. Même sur des configurations particulièrement costauds, ces problèmes peuvent survenir et lors du test, il m’a été impossible d’enchaîner plus de 2 parties sans provoquer une erreur fatale. On ne peut pas dire non plus que DICE ait été particulièrement chanceux ses derniers jours non plus puisqu’ils ont même subit une attaque DDoS en règle il n’y a pas longtemps. Le jeu est bien patché pour réparer un peu tout ça mais ça reste encore relativement instable et encore une fois, l’impression que le jeu a été rushé se fait ressentir face à tous ces problèmes et comme on nous le vend comme un jeu AAA, pas facile de leur pardonner. Relativisons tout de même : si les problèmes concernaient vraiment une partie importante des joueurs PC, on aurait quand même du mal à trouver une partie et ce n’était pas le cas. Et puis il y a quand même 10 maps et le retour de l’option Commander pour une partie des modes de jeu présents pour les plus stratèges.
Une campagne solo médiocre
En revanche, si Battlefield n’a jamais été connu pour sa partie solo, on peut se demander quel était l’intérêt de fournir autant d’efforts et d’argent dans celui de Battlefield 4. Si graphiquement et au niveau de la mise en scène, il est difficile d’attaquer le jeu, on pourra déplorer une histoire complètement bidon et bourrée de clichés, des personnages sans saveur et peu crédible (malgré un doublage plus que correct autant en VF qu’en VO), mais surtout, des scripts absolument immondes qui ont en plus l’audace de ne pas se déclencher correctement si vous décidez de ne pas suivre le chemin que le jeu veut vous faire prendre et d’une façon précise. L’IA est minable autant du côté des alliés que des ennemis qui vous feront l’insulte de ne pas se mettre à couvert correctement, laissant apparaître leur tête bien en évidence.
[quote_center]Pour un titre AAA, cela fait quand même un peu tâche de devoir ruser et bidouiller dans les fichiers pour faire fonctionner le jeu[/quote_center]
On est en plus avec des alliés invincibles, avec munitions illimités, qui peuvent au début vous aider à éliminer les adversaires à moins que le jeu ne décide que vous êtes le seul meurtrier habilité à porter le coup fatal : si c’est le cas, même juste en face, vos alliés vous gratifieront d’une pseudo mise en scène pour essayer de vous faire ressentir la panique de la situation, sauf que louper sa cible à 2 mètre de soi, sans aucun obstacle apparent, ça enlève un peu l’effet d’immersion voulu.
On ne se sent jamais vraiment en danger, on a jamais envie de protéger personne même quand c’est l’objectif (de toute façon, même en se prenant une roquette en pleine face, ils seront toujours en vie contrairement à vous), on retrouve des caisses d’armes (et donc de munition) trop régulièrement et parfois dans des endroits improbables. Même en mode difficile, vous bloquerez rarement sur une séquence avant de la passer. Si EA Games vend sa campagne solo comme une sorte de didacticiel pour prendre les commandes en main et piloter quelques véhicules avant d’attaquer le multi, il n’en est rien et un vrai didacticiel aurait été préférable pour préparer les néophytes à vraiment profiter des qualités du jeu, les mécaniques de jeu étant totalement différentes une fois qu’on joue en ligne. Ah, et on peut débloquer des armes pendant la campagne mais ça reste ultra anecdotique.
La fin est limite trollesque et n’a rien à envier à celle de Mass Effect 3 sur le principe mais comme tout le long du jeu, vos compagnons vous prennent pour un attardé (parce que forcément, votre personnage a le clapet fermé sauf pour papouiller de douleurs et que pour communiquer, ça se limite à serrer la main et prendre un objet), vous n’en n’aurez limite rien à secouer des conséquences de votre choix final (oups spoiler) tellement votre implication dans l’histoire demeurera superficielle d’un bout à l’autre.
C’est vraiment triste à dire, mais le jeu aurait du se passer d’une campagne solo ou limite la remplacer par des missions en coopération. On se dit franchement que les moyens déployer pour ce dernier aurait pu plutôt servir à améliorer l’expérience de jeu en ligne ou la stabilité de la version PC, voir aussi des versions consoles. Précisons également que la campagne solo comporte son petit lot de bugs en tout genre qui peuvent parfois vous faire recommencer un chapitre entier car le système de sauvegarde est automatique (merci les consoles) et qu’il est impossible d’enregistrer manuellement. On ne peut donc que revenir au dernier checkpoint ou recommencer depuis le tout début.
Un jeu clairement opportuniste
La sortie de la Playstation 4 et de la Xbox One semble tout de même clairement avoir motivé la sortie de ce 4ème opus, le sentiment d’avoir un jeu un peu rushé se fait encore plus ressentir sur la version PC qui connait nombre de problèmes de freezes et de crashes pour une partie des joueurs. Les améliorations et nouveautés sont peu nombreuses, renforçant cette impression d’avoir à faire avec une extension que l’on a payé pleins pot. EA Games aurait pu, comme l’année dernière, renforcer les possibilités de Battlefield 3 pour donner plus de temps à son jeu de prendre l’ampleur, notamment sur la scène e-sport. Mais la tentation de sortir absolument un titre sur les prochaines consoles aura été plus forte (en plus de se retrouver indirectement et sans vraiment le vouloir en concurrence avec Call of Duty) et a sans aucun doute fait du tord à cet épisode qui devra se bonifier au fil des mises à jour, en plus de recommencer le travail débuté avec Battlefield 3. Un choix vraiment étrange vu les qualités de son prédécesseur…
Les choses avaient pourtant bien commencé avec l’organisation d’une coupe de France de Battlefield 3, qui aurait pu être l’occasion aussi d’intéresser le public si tous les efforts n’avaient pas portés que sur ceux qui connaissent déjà le jeu. Du coup, le 3ème opus risque de finir dans l’oubli après seulement 2 ans de service et même si des événements continues d’être créés autour du jeu pendant un petit moment, ils seront forcément éclipsé par ceux organisés pour le 4. Apporter plus d’outils pour retransmettre les matches plus efficacement et rendre les matches « regardable », trouver des personnes compétentes et intéressantes pour parler du titre sans trop en faire (coucou Salomé avec Battlefield TV), continuer à mettre à jour et corriger les bugs du jeu, équilibrer le système de jeu, un peu plus investir dans le streaming de compétitions : tout cela se fera sans doute pour cet épisode… mais aurait pu se faire pour le 3.
Sur la forme, Battlefield 4 n’est pas un mauvais jeu en soi quand il fonctionne bien; il est beau, jouable et offre une très grande liberté de gameplay (en multi). Dans le fond, ce qui lui fait plus défaut que ses problèmes techniques, c’est l’impression de se retrouver avec un jeu moins achevé que son prédécesseur et qui ne semble pas vraiment comprendre les attentes de sa propre communauté de joueurs. Si vous voulez un beau FPS en multi accompagné d’un gameplay intelligent, Battlefield 3 (oui, oui, 3) semble être pour le moment la meilleure alternative car le jeu est du coup un peu plus abouti et qu’il vous coutera un peu moins cher en attendant une éventuelle baisse de prix du 4. Et à la guéguerre « call of ou BF cette année ? », la réponse est aucun des 2 : accepter ces pratiques commerciales, c’est accepter qu’une communauté est incapable de soutenir un jeu qu’elle aime autrement qu’en achetant tous les opus aveuglément chaque année et conforter de mauvaises idées à se développer encore plus. Finalement, la façon dont est traité Ryker dans la campagne solo cristallise un peu la direction choisie par DICE et EA Games : l’impression d’être ignoré par le jeu et la frustration de ne pouvoir que subir des événements qu’il nous impose.
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