Docteur Maboul, c’est dépassé : votre nouveau meilleur pote sur la table d’opération, c’est Bob. Déjà torturé par des centaines de milliers de joueurs sur PC, Bob a récemment fait son arrivée sur PS4. Et ce n’est pas la maniabilité revisitée qui va l’empêcher de prendre bien cher dans Surgeon Simulator Anniversary Edition.
Lorsqu’il est sorti sur PC en 2013, Surgeon Simulator s’est imposé comme un jeu master troll : très difficile à prendre en main – une touche de clavier est nécessaire pour contrôler chaque doigt de l’unique main qu’utilise le chirurgien – il est également totalement minimaliste quand il s’agit de donner des indices au joueur concernant ce qu’il doit faire. Pas de tuto non plus : à peine le jeu lancé, vous devez contrôler la main du chirurgien avec un but à la fois précis et terriblement vague : précis parce qu’on vous indique la finalité de l’opération, vague parce qu’on vous largue au milieu d’un bloc opératoire rocambolesque où une bouteille de jus d’orange côtoie la scie circulaire et une collection de bistouris. Et même plus, en réalité.
Ainsi, la première opération de Surgeon Simulator vous propose de réaliser une transplantation cardiaque. Jusque-là, rien de bien étonnant me direz-vous, pour un jeu se présentant comme un simulateur de chirurgie. Seulement on comprend bien vite que pour arriver à atteindre l’objectif, la finesse ne va pas vraiment être de mise : le carnage commence quand la nécessité de défoncer la cage thoracique de Bob le patient, pour extraire un par un chaque organe vital dans l’optique d’atteindre le coeur, se fait sentir.
Boucherie Simulator
Surgeon Simulator n’est pas une simulation à proprement parler, en tout cas, pas de la façon dont on a l’habitude d’employer le terme dans le jeu vidéo : ce n’est absolument pas réaliste, et fort heureusement, sinon le taux de mortalité dans les hôpitaux crèverait le plafond. Mais en vérité, c’est un peu ça qui fait le côté fun et attractif du jeu : après tout, est-ce qu’on a vraiment envie de mettre les mains dans les entrailles d’un patient, aussi virtuel soit-il ? Bob semble d’ailleurs plutôt content d’être là, endormi profondément pour mieux se faire mixer les intestins par une scie circulaire allumée tombée malencontreusement de l’unique main du chirurgien manchot. Et je ne vous parle pas de la greffe de cerveau (!) qui nécessite d’ouvrir le crâne du patient façon oeuf à la coque.
Surgeon Simulator se révèle plutôt être un jeu bien cynique, qui cherche à mettre en avant de façon trollesque le fait que le métier de chirurgien est extrêmement difficile. Non seulement il demande une maîtrise parfaite des outils, mais également de solides connaissances. Malgré tout, il y a fort à parier que même un vrai médecin habitué du bloc serait perdu face au challenge que propose le titre. La mise en abyme est donc plutôt poussive, mais si on parvient à accepter le parti-pris du jeu, il y a moyen de s’amuser.
Et hop ! Avec une main !
Côté maniabilité, on échappe sur PS4 à la règle « un doigt, une touche » et seuls deux boutons de la manette sont nécessaires pour manipuler la main – le pouce et l’index contrôlés, par l’un, le reste des doigts par l’autre. Il est possible d’opter pour les sticks analogiques ou le gyroscope pour le reste des mouvements de la main. Un choix vraiment laissé à l’appréciation du joueur. Dans tous les cas, même si ce n’est pas la panacée, ça reste relativement plus maniable que sur PC. Ne vous attendez tout de même pas à jouer du bistouri avec maestria : même si, au fil des opérations, on finit par prendre de l’assurance, la plupart des erreurs entraînent une punition. Et quand le sang du patient s’écoule à flot, on cède facilement à la panique, et c’est la porte ouverte au grand n’importe quoi.
Si on ajoute à cela une physique improbable et des conditions d’opération souvent rocambolesques – essayer de greffer des reins dans une ambulance roulant à toute berzingue les portes ouvertes, laissant échapper bistouris et organes vitaux sur chaque dos d’âne – et vous obtenez un jeu capable de mettre vos nerfs à rude épreuve. Au fil des opérations, on débloque des nouveautés exotiques qui donnent des résultats souvent gores, qu’on s’y prenne bien ou pas, d’ailleurs – joli paradoxe. Mention spéciale à l’opération des yeux, ainsi qu’à celle… non, c’est un secret.
Tu veux mon bras ?
L’édition « anniversaire » de Surgeon Simulator s’étoffe d’un mode multijoueur qui permet de jouer avec un ami qui, lui, contrôle la seconde main du chirurgien. On pourrait croire que ça va aider, mais ça n’entraîne finalement que deux fois plus de maladresse, et le patient se vide généralement encore plus vite de son sang. Alors oui, c’est vrai qu’on se marre beaucoup à jouer au bac à sable dans le bide d’un patient… tout du moins au début. Si on prend ça comme un défi, on devient vite dingue, et on finit par céder au n’importe quoi.
[youtube QsCxl1uG9j4 620 360]
Pour ceux qui s’acharneront à terminer le titre, la durée de vie s’avère bonne : 5 opérations sont proposées, le tout dans 4 situations différentes – le bloc, le couloir de l’hôpital, dans l’ambulance, et dans l’espace – et 2 opérations bonus sont planquées. Chaque situation est différente et plus on avance, pour sa se corse. Vous en avez donc pour de longues heures avant de tout boucler, et encore plus si vous relevez ensuite le challenge avec un ami.
Arrêt maladie
Ce constat effectué, on peut se dire que Surgeon Simulator A&E vaut bien les 10,99€ demandé sur le PS Store. Si certain estimeront que le prix est à la hauteur du contenu, chez GG on trouve la note un peu trop élevée . Surgeon Simulator a été, à la base, développé en 48h par ses créateurs, à l’occasion d’un week-end de conception de jeu. C’est donc une vaste blague qui, même si elle a été étoffée depuis, est vendue à un tarif prohibitif à l’égard du contenu.
Pour autant, le jeu n’est pas une arnaque : il revendique son côté trollesque jusque dans sa bande-annonce. Le site des développeurs ne laisse aucun doute quant au contenu du titre. Il faut donc acquérir Surgeon Simulator en connaissance de cause, en sachant clairement qu’il s’agit d’un jeu très difficile dont le public se compose avant tout de joueurs acharnés qui aiment galérer en jouant (et accessoirement faire souffrir un patient virtuel). Honnêtement, même comme ça, la note apparaît comme étant salée… sans compter qu’elle n’est pas remboursable par la sécu !
On ne nous enlèvera de toute façon pas de l’idée que Surgeon Simulator est un troll monumental, et que son prix élevé à l’égard de la proposition fait partie de la démarche des développeurs. Ces derniers doivent d’ailleurs bien se bidonner en constatant que des gens – telle l’auteure de ces lignes – tentent de trouver une explication concrète à ce qui n’est probablement qu’un délire nocturne ayant plutôt bien tourné pour ses créateurs.