Le monde de Thédas en a connu des vertes et des pas mûres ces dernières années : d’abord victime d’un Enclin lors du premier jeu, il voit ensuite ses mages se rebeller à cause des événements du second.
Si Dragon Age Origins avait été plutôt bien accueilli par le public et la critique, sa suite, Dragon Age II, avait déçu : histoire à trop petite échelle, level design très répétitif, combats simplifiés, n’avaient pas fait l’unanimité.
C’est dans ce contexte un brin tendu, aussi bien en Thédas avec sa guerre civile et sa rébellion, que pour le studio Bioware, qu’arrive Dragon Age Inquistion, troisième opus de cette fresque médiévo-fantastique. On nous promet un monde ouvert, une histoire épique, des choix, bref, que de la bonne. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres, d’autant que Bioware jouait gros pour redorer son blason. Pari réussi ?
[styled_box title= »Synopsis » class= » »]
Après les événements de Kirkwall, ça s’agite un peu partout en Thédas, et les Templiers décident que les bêtises des mages, ça va bien un moment. Mais les mages, de leur côté, en ont un peu assez d’être considérés comme des moins que rien, et se rebellent. Du coup, c’est le drame, tout le monde se fout sur le nez, et ça ne va plus du tout, DU TOUT.
La Divine Justinia V décide donc de réunir un conclave, dernière chance de négocier une paix entre les mages et les templiers. Mais rien ne se passe comme prévu, puisque le temple accueillant les pourparlers est détruit dans une explosion, explosion qui, en plus de tuer tout le monde, ouvre une immense brèche dans le ciel, par laquelle pleut une nuée de démons en direct import de l’Immatériel.
Votre personnage, qui se trouvait là un p’tit peu par hasard, est le seul survivant de cette catastrophe. Et, un malheur n’arrivant jamais seul, vous commencez le jeu avec une marque bizarre sur la main, marque qui semble vous tuer à petits feux et EN PLUS, vous êtes prisonnier de Cassandra Pentaghast, une chercheuse de la Vérité qui n’a pas l’air commode (mais qui a bien l’air sévère).
Allez-vous pouvoir sauver le monde ?? Dun dun DUUUUUUUN !
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La première chose que vous faites une fois aux commandes du jeu, c’est, bien sûr, de créer votre personnage. Vous choisissez sa race, son sexe, sa classe, et surtout, sa tête : l’outil de création des personnages est léger en tatouages et en cheveux [quote_left]L’outil de création des personnages est riche[/quote_left] (non mais ces coupes de cheveux, franchement, Bioware… ), mais en ce qui concerne le visage, tout est modifiable et personnalisable. Si vous êtes patient et un peu doué, vous pouvez recréer votre propre tête, et c’est très appréciable pour un jeu qui met l’accent sur l’immersion.
Une fois ces considérations bassement esthétiques réglées, un petit verre de Banga, et en route pour l’aventure.
Dans Dragon Age Inquisition, le monde est ouvert. On passe donc énormément de temps à explorer des décors parfois immenses. Il est loin le temps des routes toutes tracées des deux premiers volets. Il y a toujours des chemins, mais rien ne vous oblige à les emprunter.
Une grande partie du jeu consistera donc à visiter les différentes régions, pour trouver des quêtes, des minéraux, des plantes, des trésors cachés, pour fonder des avant-postes (qui serviront ensuite de points de voyage rapide)… Bref, de l’exploration pure et dure.
Il y a aussi quelques mécanismes énigmatiques disséminés un peu partout, qu’on enclenche en résolvant des énigmes du type : « dessinez une barque funéraire viking sans lever le stylo et sans passer deux fois au même endroit ».
Pour faciliter la chose, certaines régions étant vraiment très grandes, un système de montures fait son apparition : à vous poneys et caribous, pour voyager plus vite d’un point à un autre. Cependant, comme il faut descendre de la bête pour effectuer la moindre action, même parler aux gens (alors que bon, parler à quelqu’un en étant sur un cheval, ça se fait assez bien), certains joueurs préféreront sans doute voyager à pied.
Évidemment, nous sommes en pleine guerre civile, et en plein drame du ciel qui crache des démons, alors l’exploration ne ressemblera pas tellement à une promenade de santé. Vous allez vous battre.[quote_right]Il y a un vaste monde à explorer[/quote_right]
Le système de combat est une sorte de mélange entre ceux des deux premiers jeux : un poil moins tactique que celui du premier, mais un peu plus que celui du second. La pause tactique est toujours là (avec plus ou moins de bonheur, mais nous y reviendrons), et vous gérez toujours votre équipe de quatre en fonction de leurs capacités : corps à corps, tanking, distance…
Le gros changement par rapport aux opus précédents vient du système de soin : aucun de vos mages ne soigne vraiment, et vous devrez donc vous reposer uniquement sur vos potions. Ces dernières sont disponibles en petites quantités, mais vous pouvez les recharger assez facilement, soit dans les avant-postes, soit dans des caisses prévues à cet effet dans les donjons. En contrepartie, la résurrection est plus « facile », puisqu’il suffit d’aller cliquer quelques secondes sur le personnage à terre pour le relever. Bon, en vrai, c’est facile en théorie, mais en pratique, c’est parfois un peu tendu.
Notons également que les arbres de talents d’une classe sont tous les mêmes en début de partie : il faudra attendre un point précis du jeu pour que chaque personnage voit apparaître son arbre spécifique. Cassandra se verra ainsi dotée d’un arbre de templier par exemple, là où Iron Bull aura des capacités de Berserker.
L’IA automatique, que l’on pouvait programmer un peu comme on voulait dans les deux autres opus, disparaît également. Tout au plus pouvez vous choisir à partir de quand vos compagnons prendront une potion, ce qui vous force, sur les combats les plus peuplés ou les plus difficiles, à intervenir vous-même, là où une IA réglée comme vous le souhaitiez pouvait auparavant faire l’affaire.
Après avoir bien battu la campagne et les vilains, les personnages peuvent se ressourcer au quartier général de l’Inquisition, où il y a moult choses à faire également.
A commencer par du crafting : si vous avez looté deux-trois plans sympas et les matériaux adéquats, le jeu vous offre la possibilité de faire vos armes, vos armures, de fabriquer des améliorations pour aller avec, comme de meilleurs jambières, une meilleure poignée pour votre épée, votre bâton de mage, ou encore un meilleur système de visée pour l’arbalète de Varric.
Chaque plan vous permet de faire un objet d’un certain niveau, dont les statistiques maximums seront atteintes si vous employez les meilleurs matériaux. Évidemment, chaque métal, chaque tissu [quote_left]Le quartier général n’est pas avare d’activités secondaires[/quote_left]a ses spécificités propres : celui-ci vous protégera des dommages électriques, celui-là du feu, cet autre ajoutera des dégâts élémentaires de glace à votre arme…
Bref, de quoi s’habiller pour chaque occasion. En plus chaque matière première donne une note colorée particulière aux armures, vous pouvez donc vous faire une parure qui rehausse votre teint, ou vos yeux, ou vos cheveux, et mieux encore, chaque armure craftée s’adapte aux différents personnages : ce qui fait une longue veste à l’Inquisiteur fera un léger plastron à votre compagnon Iron Bull, mais fera une armure … Cassandra-like pour Cassandra, etc. Vous voyez donc les changements opérés dans l’équipement, sans trahir la personnalité et le style de départ.
Une fois réglés les détails vestimentaires, vous lancerez bien une petite mission grâce à votre conseil de guerre ? Vite, courez à votre table des opérations pour consulter vos conseillers : Cullen le Templier, Leliana l’espionne ou Joséphine (Joséphiiiiiine <3) votre ambassadrice, et en avant Guingamp ! (ou Caen. Ou Perpignan. On est pas sectaire).
Le principe des opérations est assez simple : sur une immense carte de Thédas apparaissent des points d’intérêt, sur lesquels vous pouvez faire travailler vos conseillers et leurs ressources particulières : protéger une ville, récupérer des ressources, enquêter sur une rumeur, sceller une alliance… Une fois terminée, la mission vous rapporte un plan, des minéraux, de l’or, ou bien encore des points d’influence.
Plus le jeu avance, et plus il y en aura. Veillez cependant à bien lire les intitulés, et les commentaires des trois conseillers : selon qui vous envoyez, le résultat ne sera pas forcément le même.
Les opérations se déroulent en temps réel, et certaines peuvent prendre jusqu’à vingt heures. Pas de panique cependant : si une opération est nécessaire au déroulement de la trame principale, elle prendra rarement plus de vingt minutes. Vingt minutes que vous pourrez passer en discutant avec vos compagnons et les différents PNJ, par exemple.
Parce que oui, on est dans un jeu Bioware, il y a donc beaucoup, beaucoup de phases de dialogues, principalement avec vos compagnons. Chaque dialogue, en plus de vous en apprendre un peu plus sur eux, vous permet également de construire votre amitié, ou votre inimité. Certains dialogues débloqueront même des opérations, à mener ensuite grâce à l’un de vos trois conseillers, comme expliqué un peu plus haut.
Une fois un certain niveau d’amitié atteint, une quête de personnage sera disponible. Et peut-être même, une romance, qui sait ?
Pour finir sur les personnages, comme dans les jeux précédents, leur amitié est également corrélée à vos décisions en cours d’histoire. Et, bien entendu, dans presque 100% des cas, si quelqu’un est content de votre choix, ça veut dire que quelqu’un d’autre ne sera pas satisfait. Lors des quêtes standards, les conflits peuvent être évités en créant un groupe « cohérent » au niveau des idées, mais à la fin des missions principales, tous vos compagnons réagissent. Il faudra donc la jouer avec doigté. Ou pas, d’ailleurs, parce qu’on est dans un jeu de rôles, et que vous faites bien comme vous le sentez.
Si vous avez du mal à vous attacher l’affection d’un compagnon par vos choix, mais que vous voulez quand même son approbation, il est possible d’y arriver : pratiquement tous les compagnons offrent des petites quêtes du type « oh là là, j’aimerais bien retrouver ces objets perdus dans le monde suite à la guerre ». Normalement, entre ça et un peu de diplomatie, ce n’est pas insurmontable, même si, soyons honnêtes, certains personnages sont compliqués à satisfaire. Madame Vivienne est très sérieuse et un peu vieux jeu dans sa vision des mages, mais comme c’en est un elle-même, lui plaire requiert un savant équilibre entre contrôle et respect des mages. Un autre personnage est un peu autiste (au sens clinique du terme), c’est donc difficile de comprendre ce qu’il veut. Quant à Sera, elle est hyperactive tendance YOLO, et vous approuve ou désapprouve sans que vous ne saisissiez bien pourquoi.
Un des points positifs du jeu, c’est que vous n’êtes pas limité à trois choix de réponse comme dans Dragon Age II, et que vos compagnons ne répondent pas toujours de la même façon : Cassandra par exemple, vous soutiendra si parfois vous vous montrez triste face à un événement, mais un peu plus loin, il ne faudra pas montrer de tristesse, mais plutôt de la colère ou de la détermination, sinon, elle « désapprouvera légèrement ». Et, pour les puristes, on peut même désactiver l’affichage des icônes au centre de la roue de réponses. Histoire de ne pas se laisser influencer.
Il est bon de noter également qu’il n’y a pas de jauge d’amitié ou de rivalité, contrairement aux précédents jeux. Pour certains, ce sera un plus qui rend le jeu plus réaliste (oui, parce qu’en effet, dans la vie, vos potes n’ont pas une jauge au-dessus de la tête. « Oulalala, faudrait que j’appelle Hercules didon, sa jauge descend drôlement ces derniers temps »). Pour d’autres, ce sera un problème, parce qu’avec neuf compagnons, et un jeu qui dure une petite centaine d’heures si on veut tout boucler, c’est un peu délicat de se souvenir de tout. Combien de fois Cassandra a-t-elle approuvé ? Approuvé grandement ? Désapprouvé légèrement ?[quote_right]Vous devrez gagner le respect de vos compagnons, mais aussi de tout un continent[/quote_right]
Alors, certes, la façon dont vos alliés vous parlent peut être un indice, mais… Vivienne est toujours un peu stricte et secrète, alors c’est difficile de savoir si elle stricte parce qu’elle ne peut pas vous blairer, ou si c’est juste son côté vieille maitresse d’école. Et le problème se rencontre avec d’autres personnages, comme Dorian, qui est toujours très cynique et moqueur : jusqu’à un certain point dans le jeu, on ne sait pas trop s’il nous taquine ou s’il se fout ouvertement de nous.
Si vos compagnons et vos conseillers sont la principale source de dialogues, vous pourrez également parler à d’autres personnes, soit dans votre quartier général, soit croisés un peu au hasard de vos pérégrinations. En principe, quand vous pouvez parler à quelqu’un, c’est qu’il a une quête à vous proposer, ou qu’il va débloquer une opération. Et même, parfois, vous pourrez le recruter en temps qu’agent de l’Inquisition. Il ira alors grossir les rangs des troupes de Cullen, Leliana ou Joséphine, augmentant par là même leur vitesse lors des opérations. Et aussi votre influence sur Thédas.
Enfin, pour finir sur les mécaniques de jeux, parlons un peu de l’expérience gagnée. Elle prend ici plusieurs formes.
Il y a tout d’abord l’expérience classique que vous gagnez en réalisant des quêtes ou en gagnant des combats. Chaque niveau gagné vous donne un point à placer dans l’un de vos arbres de compétences. Contrairement aux jeux précédents qui vous offraient également des points pour augmenter vos statistiques, ici, vous ne gagnerez que ce point, et rien d’autre. Cependant, certaines capacités de vos arbres de compétences boosteront vos attributs. C’est plus simple, mais ça ne permet pas une personnalisation aussi poussée que dans les autres jeux : dans Dragon Age II par exemple, si vous montiez Aveline (enfin si vous la montiez, on se comprend, bande de coquinous) d’une façon peu conventionnelle, vous en faisiez un tank invincible. Avec un DPS de moule, certes, mais invincible.
Ici, vous devrez rester dans les limites de ce que proposent les arbres de compétences.
En arpentant le monde et en résolvant divers problèmes, vous gagnerez également des points de pouvoir, qui représentent votre réputation. En effet, vous commencez le jeu comme une bande d’hérétiques en qui personne ne croit, et surtout, en qui personne n’a confiance. Le fait d’aider les gens, même pour des choses triviales, d’achever certaines quêtes principales et secondaires remédie à ce problème, et peu à peu, votre influence grandit.
Chaque niveau d’influence gagné vous offre un point d’Inquisition, à utiliser pour solidifier votre organisation.
Et là, ça devient un peu délicat. Parce qu’en une partie normale (et même anormale d’ailleurs), il y a peu de chances que vous obteniez suffisamment de points pour débloquer tous les bonus offerts par l’Inquisition. Il faut donc bien réfléchir : va-t-on privilégier l’armée et obtenir du coup un inventaire plus grand, un peu plus de force de frappe ? Va-t-on privilégier les espions, pour ainsi crocheter les portes les plus complexes de l’aventure ? Ou s’offrir plus de possibilités de dialogues et de richesses en privilégiant la diplomatie ?
C’est à vous de voir.
On a donc un gameplay assez varié, mais qui n’est pas exempt de défauts.
L’exploration, tout d’abord, est parfois un peu hasardeuse, parce qu’il n’est pas toujours très facile de savoir où le jeu a prévu qu’on pouvait marcher, et où il a [quote_left]Bien sûr, le gameplay n’est pas parfait…[/quote_left]prévu qu’on ne pouvait pas. On peut donc passer des heures à tenter de sauter sur un rebord pour atteindre un chemin au-dessus, parce qu’on ne voit pas d’autre moyen d’y accéder. Et parfois, ça va marcher, parfois, non, c’est assez dur de comprendre la règle.
Pour ceux qui ont joué à Mass Effect premier du nom, on a un peu l’impression d’être à bord du Mako. Sauf qu’on est à pieds. Et qu’on a donc l’air encore plus crétin en insistant pour gravir une côte.
D’ailleurs, ça perturbe grandement vos compagnons, qui restent parfois à vous regarder comme des merlans frits, ou bien qui semblent coincés devant une échelle. En règle générale, ils finissent par se téléporter à vos côtés si vous vous éloignez trop, mais il pourra arriver qu’ils vous rejoignent très en retard en cas de combat. Rien de bien grave, mais ça ruine un peu l’immersion.
Et comme dans tout monde ouvert, certaines zones sont parfois un peu labyrinthiques, principalement à cause des déplacements mal balisés.
L’exploration souffre d’un autre problème qui ralentit clairement les déplacements : l’interaction avec les objets. Il faut en effet être collé, littéralement, aux coffres, portes, loots, plantes, pour pouvoir interagir avec eux. Comme on est en monde ouvert, il est évident que l’accès à certains coffres est volontairement compliqué : il faut trouver le chemin, et dans ces [quote_right]L’interaction avec l’environnement est parfois lourde[/quote_right]cas précis, il est normal qu’on ne puisse pas cliquer sur lui à vingt kilomètres de distance pour l’ouvrir.
Mais dans une pièce pleine de loots, ou après un combat, ne pas pouvoir juste cliquer sur les objets pour se les approprier, ou devoir être collé à une porte pour l’ouvrir, c’est franchement pénible.
Mais le gros problème du jeu se situe au niveau des combats : la caméra tactique n’a clairement pas été pensée pour une utilisation clavier-souris, et si son utilisation était très simple dans les jeux précédents, là, c’est contre intuitif au possible, sans compter qu’on ne peut pas sélectionner toute l’équipe en même temps.
En combat, si vous voulez éviter une attaque de zone, vous êtes donc obligé de déplacer vos personnages UN PAR UN, ce qui est long, pour rien.
De plus, la caméra a très peu de recul, vous ne voyez donc jamais la zone de combat entière, il faut scroller pour voir tous les ennemis et tous vos personnages, c’est pénible. Et puis, bien sûr, lors des combats dans la nature, vous vous retrouvez souvent la tête dans le feuillage. Qui est fort joli, c’est pas le problème, mais quand vous étêtez une horde de loups, c’est quand même plus sympa de les voir EUX, plutôt que les nervures des feuilles. En mode Normal (et en mode Facile également), vous aurez peu tendance à utiliser la caméra, pour peu que vos personnages soient convenablement équipés et buildés, donc, ça peut passer, mais pour les difficultés supérieures, ça peut vite devenir le drame.
Sans compter que le défaut « il faut se coller aux objets pour interagir avec eux » est présent aussi dans les combats. Dans les jeux précédents, quand vous étiez hors de portée d’un ennemi et que vous lanciez une attaque, le personnage se [quote_left]Et la caméra tactique pas tout à fait au point[/quote_left]déplaçait automatiquement au bon endroit pour frapper. Ici, ce n’est pas le cas, et les combattants au corps à corps auront souvent tendance à agresser les molécules d’air et non les monstres, tout simplement parce que ces derniers se seront déplacés de trois centimètres.
Certes, ce n’est qu’un coup à prendre, mais c’est un peu lourd, surtout lors des combats de boss, où vous avez d’autres choses à surveiller que le placement de votre guerrier qui brasse du vent parce qu’un Templier a fait un pas chassé. Heureusement ce problème est limité au personnage que vous contrôlez.
De plus, l’IA a parfois tendance à se droguer, des deux côtés : soit vous avez des ennemis qui vous voient quand ils sont déjà au seuil de la mort, ce qui est fort dommage pour eux, soit ce sont vos compagnons qui font n’importe quoi. Ça reste assez rare, mais assez fréquent pour être signalé : un de mes personnages semble par exemple être allergique aux potions, et meurt souvent comme un étron, alors qu’il restait largement de quoi se soigner. La charge des tanks est un peu ridicule (et fait penser à la charge biotique dans Mass Effect) : le nombre de fois où Cassandra s’est retrouvée à l’autre bout de la map après une charge de trois cents mètres… C’est sans doute plus un problème de réglage de la capacité qu’un problème d’IA, mais le résultat est le même : votre tank est à Perpette-Les-Oies, et doit en revenir, pendant que vous vous faites salement démolir en attendant son retour.
Et si vous comptiez régler le comportement de votre tank sur « Défense », faites-le à vos risques et périls : que ce soit un bug isolé ou un problème de programmation du comportement, ou encore que les développeurs aient estimé que c’était normal de procéder ainsi, un tank réglé en défense… Ben il va vous défendre, ça, c’est sûr. Mais en restant littéralement COLLÉ à vous. Donc si vous êtes un mage ou un archer, votre tank est à trois lieues et demie de la mêlée, et il ne fait rien, à part lever son bouclier. Vous êtes obligé de lui demander régulièrement d’aller voir ailleurs. C’est assez déconcertant comme attitude, d’autant que ce mode de défense très spécifique n’est utile que dans fort peu de combats, souvent contre des boss facultatifs, comme les dragons par exemple.
On aurait également bien aimé avoir un coffre dans le quartier général. Parce que quatre-vingt-dix emplacements, ça finit par faire peu vers la fin du jeu, surtout quand vous avez fabriqué des armures et armes adaptées à plusieurs types d’ennemis pour des quêtes secondaires (comme la chasse aux dragons). Idem pour les potions : vous ne pouvez en porter que douze au maximum. Pour quatre personnages en combat, ça fait un peu juste, notamment dans la seconde partie de l’aventure.
Enfin, si les loots sont à peu près équilibrés (vous ne trouverez pas trois cents bâtons de mage pour une dague de voleur), les Qunari semblent quand même assez mal lotis. En effet, les armures sont souvent liées à la race, en plus de la classe. En règle générale, les nains, les humains et les elfes peuvent partager leurs tenues, sauf rares exceptions, y compris pour les casques. Les Qunari se retrouvent désavantagés, particulièrement pour les casques : après quatre-vingts heures de jeu, mon meilleur casque looté pour Iron Bull lui octroie un bonus de 11 en défense. Là où les autres ont des bonus de 30 FACILE. C’est un peu frustrant.
Malgré des défauts, Dragon Age Inquisition offre un gameplay varié : il y a énormément de choses à faire, et si finir la partie principale du jeu ne prend qu’une grosse trentaine d’heures, le nettoyer complètement vous occupera bien plus. Entre quatre-vingt et cent.
Le monde de Thédas est donc vaste, varié, et assez joli, du moins en ce qui concerne les décors. Bioware’s touch oblige, les animations des personnages sont toujours un peu raidasses, avec une tendance au grand n’importe quoi : de vos compagnons qui tournent en rond comme des cochons malades en arrière-plan parce que vous les avez coincés dans un coin en [quote_right]Le jeu est malgré tout assez joli et le level design varié[/quote_right]lançant un dialogue, à votre personnage qui ne sait pas poser sa tête sur sa main, la main étant soit DANS la joue (ce qui doit être douloureux), soit à dix centimètres du menton (ce qui ne sert à rien).
Il a aussi le déplacement WTF en moonwalk de certains PNJ, d’autres qui popent d’un coup hors du sol… Tout ceci manque de finition.
Après, si vous êtes pris dans l’histoire et dans l’univers, ces problèmes restent vraiment secondaires, et vous feront surtout sourire, même si certains peuvent casser l’immersion, comme quand mon Inquisitrice se servait de son bras comme d’un cache-nez lors d’une cutscene. C’était un peu flippant.
Quoi qu’il en soit, si Dragon Age II laissait un goût de bâclé quant au level design, ce n’est pas le cas ici : les régions sont vastes, les donjons et les différents niveaux aussi, et vous ne rencontrerez pas deux fois la même configuration.
Les régions, bien qu’étendues, arrivent à trouver un juste milieu entre désert et population : vous n’aurez certes jamais l’impression d’être aux Galeries Lafayette une veille de Noël, mais il y aura toujours un hameau, un village, des chasseurs, des bandits, des bêtes… De quoi profiter des paysages et du climat sans se sentir trop seul.
Les temps de chargement restent dans la limite du raisonnable, surtout si l’on tient compte de la taille des zones, sauf le tout premier, au lancement du jeu. En revanche, le jeu en lui-même est d’une stabilité aléatoire selon les machines : certains ont des retours bureau fréquents (ce qui était mon cas avant de passer sous Mantle au lieu de Direct X), d’autres ont des chutes de framerate. Il y a quelques bugs divers et variés qui traînent, mais c’est assez diffus, et sur plus de cent heures de jeu, je n’ai rencontré personnellement que quelques retours bureau.
L’histoire n’est pas en reste pour proposer un univers riche et immersif. Enfin, l’histoire… La trame principale n’a bien sûr rien d’original : vous êtes l’élu, vous devez sauver le monde d’une terrrrrrrrible menace (dun dun DUUUUN), mais le jeu vous plonge quand même dans son monde grâce à des PNJ assez bien écrits, et relativement riches, parfois même tragiques. Ils ont chacun leur histoire, qui leur donne un point de vue particulier sur le monde et son contexte politique. Libre à vous d’être d’accord ou pas avec eux, mais leurs opinions ont le mérite d’être argumentées, ce qui les rend attachants, ou haïssables, mais dans tous les cas, vivants.
Les dialogues automatiques entre vos compagnons participent, tout comme dans les [quote_left]Les PNJ et les dialogues sont réussis[/quote_left]jeux précédents, à les étoffer : ils ont une vie en dehors du joueur, ils se font des blagues, ils se draguent, ils ont des débats philosophiques… C’est souvent drôle (Varric et Cassandra, ou Varric et Vivienne dans la même équipe, c’est le fou rire assuré), parfois touchant, mais toujours efficace.
Le tout servi par un doublage de qualité, avec une montagne d’accents (du moins en version originale).
Tous ces personnages donnent l’impression de vivre dans le même monde, et par là-même, rendent ce monde vivant.
Les quêtes secondaires fonctionnent selon la même dynamiques. Certaines n’ont de secondaires que le nom : vous n’êtes pas obligé de les faire pour continuer l’aventure principale, mais elles sont tout de même directement liées à votre ennemi. Les compléter offre une impression de travail de sape, de préparation au combat final, qui est très appréciable.
Quant aux quêtes réellement secondaires, elles sont quasiment toutes liées au chaos ambiant, d’une façon ou d’une autre, ne serait ce que dans l’idée que l’Inquisition part de rien, et doit faire ses preuves.
Au début du jeu, votre Inquisition est vraiment vue comme une équipe de bras cassés, des rebelles hérétiques qui n’ont aucun pouvoir, aucune utilité. Sauver un hameau, même de quinze habitants, ça permet forcément de changer cette donne de départ. Parce que ceux qui vous observent attentivement vont voir que vous avez quelques moyens, et ceux que vous avez sauvés vont commencer à répandre le bruit que l’Inquisition, c’est des gens trop bien.
Cette montée en puissance est assez bien mise en scène, avec des moments franchement épiques, à défaut d’être originaux, le tout accompagné d’une musique qui remplit très bien son office. La bande originale est de qualité, et participe aussi à la richesse du décor au travers des bardes : dans les tavernes, il y a des bardes, qui chantent tout un tas de chansons différentes en rapport avec les personnages du jeu. Ça pose immédiatement l’ambiance, c’est assez réussi.
Et bien sûr, comme nous sommes dans un jeu Bioware, il y a des choix, et des ROMANCES !
Vous rencontrerez les choix habituels de type « Chapi et Chapo sont dans un bateau. Lequel laissez-vous tomber à l’eau ? », genre de choix toujours très sympathique à faire, surtout quand vous kiffez Chapi, mais que vous vous doutez que Chapo serait le choix raisonnable.
Ces choix ont bien sûr une certaine influence sur le déroulement du jeu, soit en facilitant un combat de boss, soit en déterminant la politique d’une région, soit encore en vous attachant l’amitié ou la haine de vos compagnons. Le paysage socio-politique de fin de jeu dépend entièrement de ce que vous aurez fait dans votre partie.
Certains détails sont plus subtilement gérés, et ne dépendent pas d’un bon gros choix « Chapi ou Chapo ? », mais prennent en compte l’intégralité de vos dialogues sur un sujet donné. Il est donc [quote_right]Les romances sont variées et drôles[/quote_right]plus difficile d’influer sur le résultat, mais c’est plus réaliste qu’un choix binaire.
Quant aux romances, elles ne plairont sans doute pas à tous (mais vous n’êtes pas obligé de romancer vos personnages), mais pour le coup, le joueur a le choix : y a des hétéros, des bis, des homos, ceux qui n’accepteront de s’engager qu’avec une personne de leur race (et du sexe opposé, soyons conservateurs jusqu’au bout), ceux qui font feu de tout bois, et même du sado-maso.
Et, bien sûr, vous aurez le choix entre de la romance délicate (et très fleur bleue), de l’amour courtois, du sexe sauvage ou du sexe normal, voire pas de sexe du tout (du moins à l’écran). Vraiment, il y a de quoi convenir à tout le monde, et les scènes « romantiques » sont assez bien pensées, très souvent drôles, et semblent bien plus naturelles que dans les jeux précédents (ne serait-ce que parce que les protagonistes y sont nus. Ce qui arrive souvent quand on fait des choses que la morale réprouve).
Dragon Age Inquisition nous donne l’impression d’un monde riche et vivant, et c’est ce qu’on attend d’un jeu de rôle, en principe. Le seul point noir ici, c’est le combat final. Vu les enjeux de la quête du personnage principal, vu tous les choix faits en amont, vu la montée épique de l’histoire, le dernier affrontement semble vraiment… Plat. La puissance de votre Inquisition n’a aucun impact, il n’y a aucun choix à y faire, aucune attaque coordonnée à lancer… Ça manque un peu de sel.
Heureusement, Inquisition n’est pas la fin d’une trilogie, mais un chapitre dans une saga, la déception reste, du coup, mesurée.
Avant de vous parler du multijoueur, quelques mots sur The Keep. C’est un site qui permet de refaire les choix des deux jeux précédents, puis d’importer ce monde dans Inquisition lorsque vous commencez une nouvelle partie.
Le point négatif, c’est que vous ne pouvez pas importer directement vos vieilles sauvegardes dans le jeu. Les points positifs, c’est que ça vous permet de continuer la saga sur une autre plateforme que celle sur laquelle vous l’aviez commencée, il n’y a pas de bugs d’import, et surtout, ça vous permet de changer rapidement un choix (et donc le monde) avant de relancer une partie. Non parce que même si on aime les jeux précédents, se les refaire juste pour UN détail, ça peut rebuter.
Dragon Age Inquisition est le premier de la série à offrir un mode multijoueur. Il ressemble un peu à celui de Mass Effect 3 : vous avez le choix au début entre trois classes, vous faites équipe jusqu’à quatre joueurs pour nettoyer un donjon divisé en cinq salles, et vous montez en niveaux.
Puis, avec votre or, vous achetez des coffres, qui vous looteront des potions, des objets, et parfois, de nouvelles classes.
[quote_left]Le multijoueur est sympa, sans plus[/quote_left]Une fois un personnage arrivé au niveau 20, niveau maximum, vous pouvez le promouvoir. Ça le ramène au niveau 1, mais ça donne un bonus d’un point en constitution, magie ou ruse à tous vos autres personnages de niveau 1.
Vous pouvez vous crafter des armures, et les arbres de compétences diffèrent légèrement de ceux du mode solo.
Ça, c’était la théorie. En pratique, le multi peut être amusant, mais souffre de plusieurs défauts, le premier étant la stabilité des serveurs. Quand nous avons testé le mode Multi avec Lisa, à défaut d’être la foire à la saucisse, c’était celle de la déconnexion gratuite.
Ensuite, le jeu vous laisse commencer un donjon si vous n’êtes que deux, mais n’adapte absolument pas la difficulté. Vous mourrez donc comme un étron dès la première salle.
Le matchmaking ne tient absolument pas compte des classes, et vous pouvez avoir trois mages et un guerrier, ce qui rend le travail de tank légèrement stressant, les mages étant un peu des majorettes à moitié nues, ils résistent très mal au corps à corps.
Enfin, la difficulté des donjons n’est pas très homogène : les quatre premières salles passent en principe café-crème, mais la dernière est une horreur, même quand vous appliquez la bonne stratégie. Qui est en fait la même pour TOUTES les salles finales (paye ta variété) : vous restez comme des péteux dans la petite antichambre du début, et vous envoyez le tank rabattre les mobs. Et vous les défaites en restant sur le pas de la porte. Trop de stratégie, trop de courage, vraiment.
Du coup, c’est amusant cinq minutes, surtout si vous tombez sur des gens sympas avec qui discuter (le multi ayant un système de chat vocal intégré), mais ça ne vous occupera pas des milliards d’heures non plus.
[styled_box title= »En résumé (tl;dr même x) » class= » »]
Si Bioware était attendu au tournant, après un Dragon Age II décevant, après la fin de Mass Effect 3, après Star Wars : The Old Republic, force est de constater que c’est un retour gagnant.
Le jeu n’est évidemment pas parfait, mais là où un Assassin’s Creed Unity n’avait rien à offrir pour faire oublier ses bugs et son gameplay mal équilibré, Dragon Age Inquisition offre des personnages sympathiques, un monde étoffé et vivant, une expérience vraiment agréable et immersive, qui rattrapent largement les problèmes techniques (sauf, bien sûr, si votre PC n’arrive pas à lancer le jeu) et les contrôles hasardeux en combat.
Inquisition offre un contenu vaste et varié, continue de construire l’univers commencé dans les jeux précédents, notamment grâce au retour de certains personnages emblématiques, propose des choix qui font sens au joueur, et sans mériter le prix Nobel de philosophie (soyons clairs), pose même de petites questions en passant. Sur la foi, le devoir, la tradition, le changement, la culture, la sexualité et le genre.
Le combat final est un peu léger, mais la fin en elle-même promet un futur radieux pour la licence, à condition, bien sûr, que Bioware (ou Electronic Arts) prenne son temps.
Quoi qu’il soit, Inquisition fera passer un bon moment aux joueurs, surtout s’ils sont adeptes des jeux précédents.
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A titre d’information, le jeu a été testé sous Windows 7, AMD Mantle, avec 8Go de Ram, une carte graphique AMD Radeon R9 200 series et un processeur Intel Core i5-4590 3.30 Ghz. Et pas de SSD.
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