La précédente saison d’Arrow ne nous avait pas laissé un souvenir impérissable : personnages creux, développements ridicules, scénario à trois francs… Clairement, c’était pas l’éclate.
Mais la seconde saison de la série fut plutôt regardable, la troisième s’achève sur un nouveau départ, de nouvelles bases et donc de nouvelles possibilités.
Nous avons donc attaqué cette quatrième saison l’esprit serein et plein d’espoir (et le cerveau en mode économie d’énergie), mais hélas… La déception fut au rendez-vous.
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Après leur très mauvaise troisième saison, Oliver et Felicity se la roucoulent douce loin de Star City, la laissant aux bons soins de Laurel, Thea et Diggle, qui ne s’en sortent pas trop mal dans un premier temps.
Mais bien sûr, la série s’appelle Arrow, pas Le Club des Trois à Star City, et Ollie va vite devoir ramener sa fraise monoexpressive pour lutter contre une nouvelle menace : Damian Darhk (Damien Shombre donc… L’imagination des auteurs de comics à l’oeuvre, Mesdames et Messieurs !) et ses Ghosts.
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Bon, on ne va pas se mentir, si le premier épisode est plutôt mignon et efficace, ça sent assez vite le rat crevé.
Déjà, parce que le coup d’Oliver qui se retire, on nous l’a déjà fait en début de seconde saison, tout comme le changement de nom. Et ensuite parce que d’entrée de jeu, on nous ressort en filigrane le même ressort dramatique qui court déjà depuis TROIS saisons : « olalalala, je suis sombre, j’ai trop de ténèbres en moi, pourrais-je être un héros positif ? Blablablabla ». Ça fait soixante épisodes que tu nous gonfles avec ça mon p’tit père, on a SAISI LE CONCEPT, passe à AUTRE CHOSE !
Evidemment, on pourrait avoir une évolution intéressante d’Ollie, qui consolide son nouvel équilibre intérieur, quelque chose de plus léger dans le ton tout en restant sérieux, et qui nous montre que Queen a appris des saisons précédentes.
Maiiiiiis… Nous sommes dans Arrow, qu’on pourrait sous-titrer « les sous-doués à Star City », et, comme dans la saison précédente, nous n’aurons donc que du drama gratuit, superficiel et mal amené, des personnages traités n’importe comment au nom d’un scénario en mousse.
Et puis, pour ceux qui ne seraient pas encore totalement convaincus que cette saison s’annonce mal, le premier épisode se termine par un flashforward, montrant Oliver et Barry en plein seum devant une pierre tombale.
Le flashforward est une arme narrative à double tranchant : soit cela crée de la tension, pendant que l’histoire s’assemble et mène inexorablement au moment annoncé, soit… C’est fait uniquement pour choquer gratuitement l’audience, être sûrs de rameuter du monde devant la télévision.
Quand on sait que, de leurs propres aveux dans des interview données en début de saison, les producteurs ne savaient pas encore qui ils allaient tuer, on voit clairement de quel côté du flashforward on se place : celui qui sent le pâté. Celui qui ne construit rien, qui décide de faire une annonce choc parce que « YOLOOOOO », et qui délivre une mort ridicule et parfaitement gratuite, jetée au milieu comme un os à un chien.
Le degré ZERO de l’écriture, en somme. Et aucun rapport avec ce bon vieux Roland (Barthes).
En plus de ce contexte peu propice à la qualité, il faut composer également avec l’introduction aux forceps, dans la première moitié de la saison, du spin off Legends of Tomorrow, qui fait perdre un temps infini à la narration pour ramener Sara et Ray, et introduire Vandal Savage.
La récupération de Ray est peu inspirée, mais passe à peu près. Mais alors le retour de Sara est une CATASTROPHE, nécessitant un enchaînement de dei ex machina.
De plus, Arrow se déroule dans un univers avec de la magie et un gars qui peut voyager dans le temps : était-on obligé, une fois de plus, de cracher sur le personnage de Laurel, sur son évolution, de lui cramer une fois encore le cerveau, pour ressusciter sa sœur ? L’était-on ?
Vous l’aurez compris, comme la saison dernière, rien, RIEN ne fonctionne.
Les personnages ne sont que l’ombre d’eux-mêmes ou de ce qu’ils auraient pu être.
Darhk, par exemple, est un méchant puissant et qui fait peur, notamment grâce à son interprète, Neal McDonough.
Mais ses motivations ne sont jamais réellement expliquées, et il est donc méchant PARCE QUE. Voilà.
Ce qui le pousse à vouloir détruire le monde AURAIT PU fonctionner, à condition de passer plus de temps à explorer le personnage, et moins à le regarder rire de façon démoniaque en assassinant des gens pour son goûter.
Et c’est pareil pour tous les autres personnages :
– vous vous souvenez quand Diggle était la voix de la raison ? C’était bien, mais apparemment, pas assez intéressant, alors les scénaristes ont décidé de lui faire faire du flan, là comme ça.
– vous vous souvenez quand Felicity était mignonne et drôle, et apportait un brin de légèreté à l’équipe ? C’était bien aussi. Mais les scénaristes ont trouvé que c’était encore mieux de la plonger dans une relation stérile avec un menteur pathologique.
Parce que oui, Oliver continue de promettre que PROMIS, JURÉ, il ne mentira plus, il est un nouvel homme. Mais il recommence l’épisode d’après. C’est déjà ce qu’il a fait toute la saison dernière, on a COMPRIS LE CONCEPT, il faudrait voir à changer le disque…
– on peut également décerner une médaille à la mère de Felicity. Ce personnage ne fonctionnant qu’à doses très homéopathiques, QUI, pour l’amour DU CIEL ET DE NOS CERVEAUX, a pensé que ce serait une bonne idée de la coller partout ? Ce personnage n’a RIEN pour lui. Elle est bête, elle ment, elle est hystérique, elle se mêle de tout, elle est insupportable.
Elle fonctionne à peu près par petites touches pour détendre l’atmosphère, mais là, c’est trop.
– et, bien sûr, cette pauvre Laurel est toujours là, personnage dont les scénaristes ne savent absolument pas quoi faire, alors ils font n’importe quoi avec.
Au milieu de tout ce marasme, il y a quand même une lueur d’espoir avec Curtis Holt (Echol Kellum), employé de Felicity et future recrue de la Team Arrow. Il est un peu comme Felicity fut, un temps : il est rigolo et attachant et intelligent.
Quant à Thea, elle continue à tirer son épingle du jeu, son problème n’étant pas son propre personnage, mais son père et son frère, qui continuent de se comporter de façon paternaliste et abusive à son encontre, au nom de l’amour.
Nous ne parlerons même pas de Malcom Merlyn : ce personnage aurait du disparaître depuis un moment, et il est proprement devenu un deux ex machina, que les scénaristes nous sortent quand ils ne savent plus trop comment avancer.
De plus, il est parfaitement imbuvable et névrosé, et il est absolument ridicule qu’Oliver continue de faire alliance avec lui, juste parce qu’il est le père de Thea. On n’est pas dans le cadre d’un type qui aurait fait une fois une bêtise, on parle d’un type qui pense à lui d’abord, qui ne manque pas une occasion de poignarder la Team Arrow dans le dos, et qui lave le cerveau de sa fille dès qu’elle n’est pas d’accord avec lui. Est-ce qu’on peut s’arrêter deux secondes sur le message plus que douteux que ça envoie ?
Et les personnages ne sont pas les seuls à ne plus fonctionner : le scénario aussi est bancal.
Les bases étaient sympathiques, avec Oliver qui veut, une fois de plus défendre la ville, cette fois en tentant de le faire publiquement, c’est-à-dire en devenant candidat à la mairie, histoire de protéger la ville dans l’ombre, mais aussi dans la lumière.
Le problème, c’est que toute la saison tourne plus ou moins autour de l’espoir à donner à la ville, et que la ville… Elle n’existe pas.
Star City, c’est trois entrepôts, un club et un poste de police. Du coup, on a un peu du mal à s’investir dans cette course à la mairie, on a du mal à s’investir dans les états d’âme d’Oliver, car la série ne parvient jamais à mettre les choses en perspective, à nous montrer des enjeux.
Pourtant, on a dans l’équipe un inspecteur de police, une jeune clubbeuse, une assistante du procureur et une cheffe d’entreprise. Ils offrent chacun de multiples possibilités pour faire exister cette ville, ses habitants, pour comprendre dans quel état d’esprit ils sont, après trois saisons à attirer des vilains de toutes sortes.
Mais la série ne nous offre rien de tout ça, Star City reste juste un nom, une masse d’anonymes invisibles, qui se réveillent à la fin, mais trop tard pour que le spectateur se sente investi.
Enfin, notons également que la série surestime grandement la suspension volontaire d’incrédulité de son public à de nombreux moments, mais surtout dans la dernière ligne droite, où il se passe des choses dramatiques qui devraient avoir des conséquences mondiales, mais… Tout le monde a l’air de s’en moquer, aucune mention chez Flash juste à côté, bref, c’est super bien écrit.
Quant au final de la saison, pour toutes les raisons évoquées plus haut, ça ne marche pas, c’est superficiel et le retournement lors de l’affrontement final est complètement ridicule.
De plus, là où Legends of Tomorrow et The Flash finissent en beauté, en faisant des annonces alléchantes, Arrow s’achève sur du vent.
Nous n’avons pas parlé des flashbacks. Ce n’est pas utile, ils sont aussi mauvais que ceux de la saison précédente.
En revanche, nous allons nous attarder un peu sur ce flashforward et ses conséquences, en balisant les spoilers, bien évidemment.
Déjà, tuer un personnage important ou semi-important dans une série comme Arrow, c’est assez compliqué : nous sommes dans un univers avec de la magie, avec des voyages temporels, avec un personnage qui a été ressuscité déjà, avec Oliver qui a survécu à un empalement, puis à une chute du haut de l’Everest par une température négative… Pour que la mort de votre personnage ne paraisse pas artificielle, il vous faut créer un contexte qui justifie tout ça.
Et ici, ce n’est pas le cas (évidemment).
De plus, en tuant un personnage auquel des spectateurs et des personnages se sont attachés, il faut prendre garde à ne pas déposséder le personnage occis de sa propre mort. D’une part en lui évitant une mort débile et parfaitement évitable, et d’autre part en centrant sa mort autour de lui, en écrivant correctement les conséquences de cet événement, et non en s’en servant juste comme d’une vague excuse pour tout centrer autour du héros.
Sans surprise, c’est raté aussi à ce niveau là, et ce qui aurait du être quelque chose de tragique, quelque chose qui ait du sens, n’est au final qu’un rebondissement ridicule et gratuit de plus.
C’est d’autant plus énervant que :
Déjà, Laurel ou pas, cette mort est tellement ridicule et évitable que c’en est insultant.
Mais en choisissant de tuer Laurel, les scénaristes s’enferment dans une sorte de schéma ridicule. Le Canary a DÉJÀ été tué au début de la saison précédente, c’était DÉJÀ une mort évitable, et d’autant plus ridicule qu’on a su quelques semaines plus tard que Sara allait revenir dans le spin off. On a donc, plus ou moins, le même personnage tué DEUX FOIS. Pour rien.
Ensuite, dans une série où Oliver a survécu a des blessures mortelles, où Felicity remarche deux semaines après avoir pris une balle dans la colonne vertébrale, Laurel meurt, à l’hôpital, après que l’opération se soit bien passée, des suites d’un coup de poignard à l’abdomen ? Vraiment ?
Coup de poignard qui, en plus, aurait pu être évité, mais cet épisode est une succession de décisions stupides et pas crédibles pour deux sous. On est loin, bien loin d’une mort justifiée, habilement amenée par une histoire solidement construite.
Et, bien évidemment, histoire d’insulter le personnage jusqu’au bout, les derniers mots de Laurel ne sont pas centrés sur son personnage, mais sur Oliver. Oui, Laurel déclare à Ollie qu’elle l’a toujours aimé. Ce chapitre était clos depuis mille ans, nous n’avions AUCUN indice qu’il restait autre chose que de l’amitié entre eux, mais si si, elle l’aime, et elle lui donne sa bénédiction pour retenter sa chance avec Felicity. C’est affligeant.
On a bien un épisode juste après qui tente de construire un héritage à Laurel et à Black Canary, mais comme nous l’avons déjà dit, la ville est inexistante, et cette tentative d’hommage tombe donc à plat.
Au final, le décès de Laurel sert surtout à justifier le comportement violent de Diggle, et celui dépressif d’Ollie. Une mort gratuite qui ne sert à rien à part faire avancer les personnages masculins.
C’est d’autant plus frustrant et énervant que les scénaristes n’ont jamais su quoi faire de Laurel, et, du coup, cette mort sonne comme un aveu d’échec, une ultime insulte au personnage : « On est trop mauvais pour l’écrire correctement, tuons-la, on a la flemme d’essayer ».
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Cette saison d’Arrow est donc un complet naufrage, avec des personnages qui n’évoluent pas, ou pire, qui régressent, avec des méchants plats, avec un enchaînement de péripéties sans sel et sans saveur.
C’est d’autant plus regrettable que contrairement à la saison 3, qui n’avait vraiment rien pour elle, la saison 4 avait des thèmes et des possibilités pour faire quelque chose de bien : on aurait pu avoir une ville vivante, qui poserait donc un véritable enjeu, on a un héros qui veut aider sa ville la nuit ET le jour, ça aurait pu être intéressant, on avait un méchant qui voulait détruire le monde par désespoir plus que par méchanceté… Il y avait vraiment de quoi faire, et au lieu de ça, on nous resuce du Olicity, on fait n’importe quoi avec Laurel, on perd un épisode à faire revenir Cupid, on perd douze épisodes avec les manigances inintéressantes de Merlyn, bref, on fait du rien, et du rien qui se prend beaucoup trop au sérieux.
Evidemment, la série n’a jamais prétendu être plus qu’un divertissement, mais The Flash et Supergirl n’ont jamais rien prétendu non plus, et pourtant, chez eux, ça marche. Plus ou moins, certes, mais ça fonctionne.
Arrow ayant été renouvelée, il faut espérer que l’équipe aux commandes va se remettre un peu en question et revenir au niveau de qualité de la seconde saison.
Ça parait d’autant plus vital qu’avec l’arrivée de Supergirl sur CW, nous aurons très certainement un crossover incluant les quatre séries DC de la chaîne. Legends of Tomorrow, The Flash et Supergirl sont loin d’être parfaites, mais la plupart de leurs personnages fonctionnent, leurs relations aussi, et Barry et Kara ont montré qu’ils avaient une alchimie fantastique à l’écran : en l’état actuel des choses, Arrow risque de faire dangereusement tache au milieu.